Actualités 1 minute 21 avril 2020

Le quotidien des chefs confinés : Guillaume Foucault

Contraints par les ordres de confinement, les chefs, habitués à vivre à toute allure, se retrouvent au chômage technique. Nous leur avons demandé comment ils occupaient leur temps libre. Aujourd'hui, Guillaume Foucault, chef du Pertica, à Vendôme.

"On avait reçu la nouvelle par un message avant  le service. On a tout de suite eu des réactions incroyables de nos clients. Certains nous ont dit : "On sait que ça va être dur pour vous. On est prêt à vous acheter de belles bouteilles pour vous aider à tenir". Après le nettoyage, la fermeture, le traitement du stock – notamment un magnifique agneau – je passe maintenant beaucoup de temps sur notre "ferme". Notre jardin aromatique n’a jamais été aussi beau : tagette minuta, tagette mandarine, rue, fenouil… La nature explose en ce moment.

Cela faisait longtemps aussi que je devais faire de nombreuses greffes de poiriers et de pommiers, des variétés anciennes et endémiques, avec des arômes très singuliers, comme des pommes au goût d’ananas ou de fruits de la passion. Ce travail sur les variétés endémiques – pomme de Rose, pomme de Coudre, poire de Calot (qui signifie noix en patois percheron), poire de Loup avec laquelle on fait un poiré exceptionnel – me tient particulièrement à cœur. Toutes ces cultures sont conduites en permaculture (la "vraie", pas celle à la mode…) au milieu de huit hectares de prairies naturelles d’une grande richesse floristique et bordées de haies anciennes. Je suis conseillé par un ancien de la Ferme du Bec Hellouin.

“Notre établissement compte énormément sur la clientèle étrangère. Sera-t-elle au rendez-vous cet été ?”

C’est tellement plein de vie que les chevreuils, qui se saoulent littéralement avec de jeunes pousses de charme, dévorent aussi quelques-uns de nos jeunes arbres fruitiers. Mes cognassiers en ont hélas fait les frais. Entre deux tâches, je discute aussi avec mon voisin Émile Auté qui s’est lancé dans un défi un peu fou : faire pousser du thé dans le Perche.

Par téléphone, je travaille à la prochaine édition de Bulles au Centre, le seul salon consacré aux vins pétillants naturels. Le prochain aura lieu dans le Perche autour du poiré et du cidre, une boisson qui bénéficie d’un véritable engouement international. De nombreuses nationalités devraient participer et notamment des Géorgiens qui fabriquent un cidre exceptionnel. Des producteurs de sakés et d’hydromel pétillants seront présents aussi, je l’espère. Les derniers producteurs de poiré sont en train de nous quitter, il faut absolument préserver et transmettre ce savoir-faire. Je m’y emploie avec d’autres depuis longtemps.

Il n’en reste pas moins que je ne sais pas si je serai encore là l’année prochaine. Notre établissement compte énormément sur la clientèle étrangère. Sera-t-elle au rendez-vous cet été ? Cette crise m’oblige à prendre beaucoup de distance. J’ai toujours entendu mes parents dire : "S’il n’y a plus de boulot dans notre domaine, on changera". Comme eux, je suis prêt à changer de métier."

Guillaume Foucault est le chef du restaurant Pertica, à Vendôme.

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