Gastronomie durable 2 minutes 15 juin 2023

Äponem : l’écrin verdoyant d’Amélie Darvas et Gaby Benicio

Elles ont fait vibrer Paris et le quartier effervescent du Canal St Martin jusqu’en 2018 avec Haï Kaï, restaurant couru pour sa courte carte, sa cuisine inventive et ses produits parfaitement sourcés. Depuis, Amélie Darvas et Gaby Benicio (re)animent Vailhan, village de l'Hérault à l’écart des flux touristiques, où elles célèbrent la nature.

Le projet d’une vie
Cette installation, loin du bruit de la capitale, dans un ancien presbytère du XVIIe siècle accolé à son église du XIIe siècle, au cœur d’un environnement viticole, elles le définissent comme un projet de vie. Gaby Benicio : « Notre but, en arrivant ici, était de construire une expérience immersive, quelque chose de l’ordre du voyage, de très intime ». Comme un besoin urgent de travailler sur le lâcher prise… Ce défi gastronomique s’est construit au cœur d’un vrai projet sociétal : « Notre réflexion a été basée sur un principe d'horizontalité. Tous les gens ont le même salaire chez Äponem . Ici, on garde la notion du temps, on préserve la santé mentale et physique de nos collaborateurs, et on essaye de travailler sur quelque chose de solennel, de presque sacré ».

Amélie Darvas / Benico-Restaurant Äponem
Amélie Darvas / Benico-Restaurant Äponem

L’ADN d’Äponem , c’est le légume, chéri et travaillé sur 7 potagers en terrasses disséminés dans le village. Amélie Darvas : « Avec le légume, on peut être très créatif, c’est même plus dur et plus challengeant que de travailler la viande et le poisson. J’ai totalement changé ma façon d’envisager la cuisine, car, à Paris, j’avais l’habitude de travailler beaucoup avec des protéines animales ».

Ode au végétal
La cuisine, créative et audacieuse, s’articule autour de ce que la nature offre au fil des saisons. « En ce moment, je travaille les haricots verts, on les mange souvent blanchis, mais j’aime les préparer presque crus, émincés, avec une brunoise de gingembre et des condiments. Nos salades sont aussi à l’honneur, avec par exemple, un cœur de laitue avec citron confit, condiments et poitrine fumée. La salade est cuite doucement vapeur puis brûlée et accompagnée d’une crème de lard ».

Benico-Restaurant Äponem
Benico-Restaurant Äponem

Cette cuisine qui célèbre le végétal a sa part d’instabilité, puisque totalement dépendante des aléas climatiques et des caprices de la nature. « Ces dernières semaines, on a planté les premières tomates, les premières courgettes, les premières aubergines… Nous avons aussi de belles fraises, très rouges et concentrées en sucre ». La feuille de figuier, dont l’huile, après macération, est présentée comme un jus de viande, le géranium, travaillé en glace ou la verveine, dans un bouillon de légumes, avec vin jaune et raviole de chèvre s’invitent joyeusement au cœur de compositions délicates et gourmandes.

Si le jardin dicte sa loi à travers l’omniprésence des légumes et des fruits qui composent les assiettes, il y a également de la volaille qui arrive de l’Aveyron, des fromages de chèvre et des poissons de ligne et crustacés de Méditerranée, à l’image des langoustines du Grau-du-Roi, accompagnées de lard de l’Aveyron, de fraises, de cacao cru et d’un jus de citron.

Benico-Restaurant Äponem
Benico-Restaurant Äponem

Si la démarche a pu interpeller et/dérouter à ses prémices, aujourd’hui les clients sont en phase avec cette célébration du végétal. « Les clients sont de plus en plus ouverts, et sont notamment sensibles aux questions de digestibilité. On peut aller au restaurant sans tomber dans le cliché des plats rabelaisiens. Chez nous, il y a une élégance de la sortie de table ! », sourit Gaby Benicio. Amélie Darvas précise : « Et puis, le végétal est un formidable terrain de jeu, avec un champ des possibles sans limites. Les gens peuvent s’en rendre compte en essayant chez eux des associations comme l’artichaut avec la fraise ou le café, le haricot vert avec le combawa… ».

Cuisine et salle, même combat
« On s’attache à créer des moments de grâce », soulève Gaby Benicio. « Tout part de la cuisine, je suis la première cliente d’Amélie. Avec ses plats, je travaille des associations avec les vins bien sûr, mais aussi avec des bières, du saké, des cocktails, des jus, des infusions… Le but est de créer une expérience sensorielle et gustative ». Le restaurant possède 1400 références de vin, avec une large place dédiée à l’Occitanie, terre promise pour de jeunes vignerons engagés, qui peuvent encore y trouver des terres financièrement accessibles. « Il y a vraiment des très belles choses dans la région, que ce soit à Vailhan ou dans des appellations comme les Terrasses du Larzac. Mais les années peuvent être difficiles, il faut s’en rendre compte. Ce travail demande une abnégation totale, c’est un sacerdoce. Le point commun avec notre travail chez Äponem , c’est l’intégrité et l’engagement total. ».

A voir aussi : L'Etoile Verte pour Äponem, rencontre avec Amélie Darvas et Gaby Benicio (vidéo).


Gaby Benicio / Restaurant Äponem
Gaby Benicio / Restaurant Äponem

La place des femmes dans le monde de la cuisine ?
« Bien sûr que les femmes sont moins visibles. En général, elles possèdent de petits établissements, de petites structures. Leurs profils majoritaires d’indépendantes, sans investisseurs, font qu’elles doivent assurer une présence totale dans leurs restaurants. Et pourtant, penser qu’elles seraient sous représentées ne reflète pas la réalité. Il suffit de regarder l’importante présence féminine dans les écoles de cuisine… », remarque Gaby Benicio.

Äponem, l’engagement total d’un duo complémentaire et une certaine idée du bonheur…

Michelin
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Hero Image : Restaurant Aponem

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