Gastronomie durable 2 minutes 13 octobre 2020

Pour une gastronomie durable : Jacques Barnachon

En 2020, le Guide MICHELIN met en avant les chefs engagés pour une gastronomie plus durable. Aujourd'hui, nous partageons le témoignage de Jacques Barnachon, chef de l'Étang du Moulin, à Bonnétage (25).

Avec ses 1 000 couverts par semaine répartis entre son bistrot et sa table gastronomique, Jacques Barnachon engendre un certain tonnage de déchets à l’année. Avec entrain et détermination, il a mis en place tout un système pour mieux recycler, mieux trier et moins polluer. Son prochain objectif est la réduction de son empreinte carbone en privilégiant les produits français : "Je m’étais fixé d’atteindre 95 % de matière première pêchée, élevée ou produite dans l’Hexagone et j’y suis arrivé." À l’écouter, c’est relativement simple de le faire et de l’expliquer : "Il faut éduquer la clientèle, faire preuve de pédagogie, constamment rappeler les saisons ou les provenances et être intransigeant." Comme tout chef de cuisine, Jacques Barnachon aimerait faire plaisir avec de la mangue, de la goyave mais à un moment, il faut admettre qu'il n'est plus envisageable de faire venir ces produits du bout du monde.

Réduire progressivement le périmètre des achats

Il a donc recentré son approvisionnement : "J’ai encore des efforts à faire. Je voudrais réduire mon périmètre d’achat, mais je suis dans le Doubs, à plus de 700 mètres d’altitude, et certains produits ne poussent pas ici ou ne sont pas élevés sur ces terres." En attendant, il privilégie en local les viandes, les escargots, les champignons ou les fromages et s’appuie sur la production de ses jardins et de ses vergers qui lui fournissent des pommes, des mirabelles ou des prunes. Les volailles arrivent de Bresse, les truites et ombles chevalier de Moselle quand les autres poissons sont tous achetés à Boulogne-sur-Mer : "Quand je parle d’intransigeance, c’est dans ce type d’achat qu’elle s’applique. Je ne veux que des poissons, des crustacés et des coquillages pêchés par des petits bateaux. Je refuse de me fournir en produits de la mer issus de bateaux usines ou pêchés hors de nos eaux territoriales." De façon à proposer le bar rôti au beurre salé et caramel de fumet de poissons ou le dos de dorade royale juste coloré.

©MICHELIN
©MICHELIN

Quel est votre axe prioritaire pour une gastronomie durable ?
"C’est essentiellement la gestion des déchets qui me préoccupait. C’est d’ailleurs toujours le cas mais je suis satisfait des résultats puisqu’en un an, on a divisé nos déchets par deux. Je trouve cependant que la France est en retard par rapport à nos pays voisins. Nous payons tous des taxes poubelles assez conséquentes mais c’est à nous de faire systématiquement les démarches. J’ai bataillé avec l’administration pour obtenir des bacs plus conséquents pour assurer un meilleur tri. Mais il y a aussi des inepties comme nous obliger à laver les plastics avant de les déposer dans le bac prévu à cet effet. D’un côté, on trie mais de l’autre, on gaspille de l’eau."

©MICHELIN
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Est-ce que votre détermination à mieux trier est comprise par vos équipes ?
"Étonnement, ils n’ont pas tous les mêmes reflexes malgré leur jeunesse. Tous ceux qui ont 25 ans et plus, trier, recycler, ne pas gaspiller, c’est aujourd’hui dans leur ADN. Ils sont sensibles à l’état de la planète et ont presque naturellement un comportement éco-responsable. J’ai plus d’inquiétudes pour les plus jeunes. On les croit éduqués à ce sujet mais en réalité, ils sont issus d’une génération de surconsommation et de gaspillage. Ils obtiennent tout en un clic et changent quand ça leur chante alors quand on leur parle de recyclage et d’écologie, ils ont du mal à entendre le message."

©MICHELIN
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Que faudrait-il envisager pour les générations futures ?
"Marteler le discours, même s’il est anxiogène. Il faudrait intégrer au collège, et pas seulement dans les CFA ou les lycées hôteliers, des modules sur le gaspillage, le recyclage, le tri. Dans les pays nordiques, cela existe déjà. En l’appliquant chez nous, nous aurions une génération très sensibilisée et ensuite, qu’elle travaille en cuisine, en boulangerie, dans un commerce ou dans un bureau, elle serait sensibilisée à la sauvegarde de la planète."

Jacques Barnachon est le chef de L'Étang du Moulin, à Bonnétage.

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