Au Sarkara, table doublement étoilée au Guide MICHELIN, on travaille en respectant les codes de la gastronomie, avec un menu composé d’amuse-bouche, entrée, plat et dessert, une carte, des accords mets et boissons. Alors quelle est la différence avec un autre restaurant ? Explications du chef.
Comment qualifieriez-vous votre cuisine ?
« Pâtissière ! 100% végétale sans viande ni poisson, mais avec des protéines animales, œufs, beurre, crème, fromages. Sarkara signifie « fragment de sucre » en sanskrit mais ce n’est pas, comme on pourrait le penser, un restaurant de desserts. Je travaille les fruits et les légumes, en me concentrant sur leurs composants naturels, et particulièrement les glucides. Il ne s'agit pas d'une succession de desserts. En septembre 2014, quand j’ai rejoint le groupe K2 Collections pour superviser la pâtisserie des trois établissements du groupe, le tea time que j’ai mis en place a connu un grand succès. J’ai ouvert en 2017 le Sarkara, un restaurant à part entière, qui offre une expérience unique. Petits exemples : Beignets au coing, gelée de génépi, billes d’amandes, eau de coing et pommes de Savoie, en amuse-bouche. Puis les herbes en crème onctueuse et gelée verte aux notes d’agrumes. Le plat de résistance ? La pomme de terre grenaille confite au beurre noisette, à la vanille et poivre de Sancho, un sablé au praliné et sarrasin. En accompagnement, un choix de thés, des vins liquoreux. Côté fromage, sérac frais, pâte de raisins et gelée de pain grillé. Et pour terminer, pas de pâtisserie mais des desserts faits minute ».
Quelle est la part des ingrédients locaux et ceux que l’on trouve en montagne en particulier ?
« Je suis fils de maraîchers, j’ai grandi à Orléans. Je suis sensible à l’origine des produits. J’utilise si possible les produits locaux, bien sûr, mais je ne pratique pas la cueillette, ce qui me différencie des chefs de montagne. J’ai cependant découvert le carvi des montagnes, pour lequel j’ai eu un véritable coup de cœur, pour son goût mentholé et citronné. J’ai même trouvé un endroit où il pousse, tout près de l’hôtel. Je cueille parfois la verse en fleur autour du lac de la Rosière. Là-bas, le paysage de roches blanches m’a inspiré un dessert givré, en trompe l’œil, que j’ai présenté en 2023 lors de la Masterclass du Toquicimes, le festival de cuisine de montagne, à Megève ».Quelles sont les contraintes de l’altitude sur les préparations en pâtisserie ?
« Je cuisine comme je ferais des expériences. Je suis un scientifique, quelque part. J’ai d'ailleurs suivi cette filière avant de m’orienter vers un CAP Pâtissier glacier-chocolatier-confiseur, en terminale, puis d’enchaîner avec un BEP Alimentation, option Pâtissier-glacier-chocolatier-confiseur. J’analyse beaucoup les choses, mais j'ai une approche de pâtissier et non de cuisinier. Mais j'ai appris cette cuisine du feu qui me manquait. Je fais maintenant des réductions, des assaisonnements. Et oui, Il y a des nombreux impacts, souvent méconnus, de l’altitude sur la cuisson ou la préparation des plats, en cuisine comme en pâtisserie. Par exemple, à Courchevel, l’eau bout à 85°C ! Il faut aussi savoir qu'il est préférable de diviser les quantités de levure par deux en raison d’une pression atmosphérique moindre à cette altitude, si on ne veut pas que les pâtes ne gonflent trop. Les meringues, elles, sont très légères et très friables ».
Photo d'illustration : Jérôme Morin/Sarkara