Gastronomie durable 3 minutes 20 octobre 2022

ONE (Roermond, Pays-Bas), quand Edwin Soumang conjugue créativité et durabilité

Grâce à ses étoiles vertes et à sa collaboration avec illycaffè, le Guide MICHELIN met en lumière le parcours de restaurants qui s’impliquent fortement en faveur de l’environnement. Le restaurant ONE à Roermond aux Pays-Bas en est un bel exemple. Nous vous racontons comment le potager d’Edwin Soumang a emprunté la voie durable.

« Nous faisions des petits chocolats pour la maison de retraite »

Vonnas. Londres. Ibiza. Australie. Canada. Zwolle. Jeune chef, Edwin Soumang a parcouru le monde entier pour affiner son art culinaire. C’est à la maison qu’est née sa passion pour les bonnes choses. Son père était chef-pâtissier, mais une allergie à la farine l’a détourné de sa vocation première et poussé à réaliser des petits chocolats à la maison. À Pâques, le jeune Edwin l’aidait à confectionner des œufs, notamment pour la maison de retraite voisine. Mais il ne se voyait pas devenir boulanger ni chocolatier, la cuisine étant sa passion initiale. Son ambition le mena à travers le monde. Après Der Bloasbalg à Wahlwiller, passage chez Georges Blanc. Un an et demi plus tard, ce fut Le Gavroche. Puis un restaurant italien touristique en Australie, la cuisine d’une île de luxe privée à Ibiza et un chalet haut de gamme à Vancouver. Le monde était le terrain de jeu d’Edwin Soumang.

Edwin Soumang ©Hugo Thomassen
Edwin Soumang ©Hugo Thomassen
« On n’apprend pas uniquement dans les grandes maisons »

Le chef limbourgeois n’a oublié aucun des établissements où il a travaillé. La passion italienne de son patron en Australie, la discipline militaire et la rigueur classique du Gavroche, l’ouverture d’esprit et l’innovation de Jonnie Boer à De Librije. Chaque expérience constitue une pièce du puzzle de sa cuisine actuelle. En 2007, le chef Soumang ouvre le restaurant ONE avec sa partenaire et sommelière Bethany DeLong, rencontrée, quoi de plus naturel, lors de l’un de ses nombreux voyages. En 2012 ils déménagent dans leur bâtiment actuel, l’ancienne industrie ECI, en lisière du centre-ville de Roermond. La plantation de quelques bacs de plantes aromatiques ouvre la voie à une démarche durable qui définit aujourd’hui la direction du restaurant ONE.

©Martijn Kersten / Josefien Bouw
©Martijn Kersten / Josefien Bouw
« Ce que l’on plante le jour est mangé par les lapins la nuit »

Après les plantes aromatiques suit un véritable potager, situé derrière l’ancien bâtiment industriel. Le célèbre jardinier Jacques Nijskens aide à semer les premières plantes en 2014... sans pouvoir empêcher le fiasco des deux premières années. En cause, la prolifération des lapins qui en font leur garde-manger. Le jardin enfin opérationnel agit comme un élément déclencheur pour ONE. Edwin Soumang y trouve un terrain de jeu privilégié, nourri par la créativité de son passé de globe-trotter, autant que par le bagage classique acquis dans des établissements tels que Le Gavroche. Il se donne le temps de découvrir de nouvelles techniques, qu’il incorpore ou non à sa cuisine.

©Martijn Kersten
©Martijn Kersten
« Nous devions jeter beaucoup pour pouvoir proposer un choix »

L’idée de ONE est simple : ce qui est produit au potager doit être servi dans l’assiette. C’est pourquoi, au fil des ans, les formules et la carte se sont transformés en un menu unique proposant un choix entre plusieurs plats. Un menu toujours en évolution, car chaque semaine changement de cap autour des amuse-gueules, plats ou douceurs. Les déchets sont limités au minimum et les chefs récoltent et travaillent consciencieusement. Le chef Soumang et son équipe portent aujourd’hui une attention à la digestibilité de leur menu. En coulisses, ils s’évertuent à peaufiner la griffe de leur cuisine et l’histoire de ONE. Plus ils suivent leur voie, plus ils découvrent. Ainsi, le potager héberge désormais des abeilles. Un jardinier s’occupe de l’entretien, aidé de bénévoles. L’équipe de cuisine et le service se rendent quotidiennement dans le potager pour assurer eux-mêmes la cueillette. La durabilité est aussi une question de bien-être. C’est pourquoi le restaurant ouvre à présent quatre jours par semaine au lieu de cinq précédemment.

©Martijn Kersten / Josefien Bouw
©Martijn Kersten / Josefien Bouw
« Nous avons aujourd’hui transposé l’idée de notre jardin au restaurant »

Expérience. Voilà un terme qui sort de la bouche de pratiquement tous les chefs à l'heure actuelle. Pour rendre la philosophie de ONE plus tangible, le restaurant a été entièrement redécoré avec des matériaux naturels. Les tables ont été réalisées par un artisan local. Le linge a disparu des tables, grâce à l’utilisation de cuir recyclé. Au beau milieu de l’édifice monumental est suspendu un jardin vertical de l’artiste de renommée internationale Claudy Jongstra, créé à partir de produits de son propre jardin et de la forêt. La durabilité est au cœur de chaque détail de ONE. Les habitants du quartier apportent leurs surplus de fruits. Des personnes viennent proposer leur collaboration pour des projets de forêt alimentaire. Comme le dit lui-même le chef Soumang, ce processus est un chantier permanent...

©Martijn Kersten / Josefien Bouw
©Martijn Kersten / Josefien Bouw
« Tout tourne autour de la qualité et non de la quantité »

Edwin Soumang s’est forgé une routine immuable lorsqu’il arrive au restaurant le matin : préparer la pâte pour son pain au levain et se faire une tasse de café. Lorsque la pâte est prête, il en prépare une deuxième. Ce qui vaut pour la viande, le poisson ou le vin vaut aussi pour le café : tout ce que l’on mange ou boit doit être de qualité. Avec le café, le chef Soumang va encore plus loin. On le trouve aussi bien dans les cocktails (par exemple l’Espresso Martini) que dans les desserts, parfois. Il prépare par exemple un soufflé au café et propose au menu de Bistro TWO, le restaurant dont il est le chef-conseiller, une profiterole fourrée de tiramisu et une glace au café.

©Josefien Bouw
©Josefien Bouw
« Le café se mêle particulièrement bien aux saveurs hivernales, de façon très chaleureuse »

Le chef Soumang aime comparer les grains de café aux grains de cacao, qu’il achète pour faire lui-même son chocolat. L’hiver dernier, il a associé du chevreuil à une sauce enrichie au cacao. Pour de tels plats d’hiver, les saveurs terreuses du café font tout aussi bien l’affaire, selon lui. On peut éventuellement les mêler au céleri-rave ou au topinambour.

« Laissez les grains de café infuser dans votre jus », conseille Edwin Soumang. « En torréfiant les grains, vous pouvez déterminer s'ils ont ou non un goût plus puissant. Pour un dessert, on peut incorporer les grains à une crème, ou en faire de la crème. On peut encore tirer de belles saveurs des écorces de grains de café. Ce produit dérivé est souvent jeté à tort. Pourtant il renferme encore de belles saveurs. Et pour utiliser le produit au maximum, gardez le marc pour le potager. Notre jardinier nous réclame régulièrement le marc de café pour lutter contre les escargots. »

Image en en-tête ©Martijn Kersten / Josefien Bouw

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