Cérémonie du Guide MICHELIN 3 minutes 22 mars 2022

Tout savoir sur les 6 nouveaux restaurants deux étoiles du Guide MICHELIN France 2022

Deux étoiles dans la vie d’un restaurant et dans celle d’un chef représentent un cap – 74 adresses seulement détiennent désormais ce précieux sésame. Du Blue Bay de Marcel Ravin à Monaco à la Table de Bruno Verjus à Paris, la diversité des talents et des cuisines suscite l’enthousiasme. Présentation des six nouveaux heureux élus !

Honneur au Sauternes : Lalique (Bommes, 33)
En 1855, le Château Lafaurie-Peyraguey fut l’un des premiers grands crus du classement des vins de Bordeaux. Il abrite aujourd’hui une table magnifique comme hors du temps où la cristallerie Lalique sert d’écrin aux plus beaux vins du domaine. Aux fourneaux, le chef alsacien Jérôme Schilling, au solide parcours (Guy Lassausaie, Château de Cordeillan-Bages, Joël Robuchon, Roger Vergé…) a eu l’intelligence de construire ses plats autour de la richesse aromatique du Sauternes. Entre classicisme et spécialités régionales, sa cuisine ne manque ni de personnalité, ni de délicatesse, à l’image de ses superbes jus concentrés en saveurs et autres sauces soyeuses et parfumées – le cuisinier se mue ici en maître de chai. Quant au cadre, il est à tomber, et l’on profite d’une immersion dans les vignes grâce à une verrière. Le soir venu, on regagne l'une des belles chambres qu'offre cet hôtel unique.

Lalique, la table étoilée du château Lafaurie Peyraguey dans le Sauternes © Anne-Emmanuelle Thion
Lalique, la table étoilée du château Lafaurie Peyraguey dans le Sauternes © Anne-Emmanuelle Thion

L’iliade gourmande de Philip Chronopoulos au Palais Royal Restaurant (Paris, 1er)
Les dieux grecs se sont penchés sur cette table. Mezze en entrée, feta, tarama, olives kalamata, loukoumedes (beignets) au dessert : aucun doute, Philip Chronopoulos vient du même pays qu’Ulysse. Il nous comble d’une cuisine méditerranéenne fortement marquée par sa Grèce natale, et réalisée sur des bases françaises. Formé notamment chez Robuchon à Londres (dont il a appris l'intensité des saveurs et la simplicité apparente) et Alain Passard (où il a eu la révélation de l'amour du beau produit), Philip Chronopoulos affirme désormais tranquillement sa personnalité.

À lire aussi : Un plat, une histoire : l'œuf de mon enfance, par Philip Chronopoulos
Le chef Philip Chronopoulos signe une cuisine méditerranéenne de haut vol © Guillaume Czerw / Restaurant du Palais Royal
Le chef Philip Chronopoulos signe une cuisine méditerranéenne de haut vol © Guillaume Czerw / Restaurant du Palais Royal

L’art de toréer les saveurs à la manière de Pierre Gagnaire : Duende (Nîmes)
Au sein de l'hôtel Maison Albar Hotels L’Imperator, la table nîmoise du grand chef Pierre Gagnaire est entre de bonnes mains ! Du service à la sommellerie, en passant évidemment par la cuisine, ce restaurant rayonne de duende, ce moment de grâce qui unit le toréador et le taureau, le danseur et sa partenaire, ou transcende la chanteuse de flamenco. Le chef Julien Caligo (passé chez Christophe Bacquié, à la Villa Madie et surtout à la table londonienne de Gagnaire, le Sketch) a épousé naturellement la philosophie de son mentor et signe ici une cuisine très méditerranéenne, de la Catalogne aux rizières de Camargue en passant par les Cévennes. Les assiettes défilent avec leurs jeux de textures, leurs associations audacieuses, leurs sauces profondes et leurs saveurs percutantes : crevettes de Palamos, canard des rizières, sole de Méditerranée, ventrèche de thon. Logan Thouillez, le jeune chef sommelier, a conçu une magnifique carte des vins à dominante régionale (et à tous les prix), avec de belles verticales des grands crus du Languedoc-Roussillon – ce qui lui a valu de remporter le prix de la plus belle carte des vins décernée par un magazine.

À lire aussi La recette du bouillon "Zezette", par Pierre Gagnaire

Duende, l'écrin gourmand de Pierre Gagnaire à l'hôtel Imperator à Nîmes © Maison Albar
Duende, l'écrin gourmand de Pierre Gagnaire à l'hôtel Imperator à Nîmes © Maison Albar

Le produit tel qu’en lui-même : Table - Bruno Verjus (Paris, 12e)
Sardine fraîche de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, rouget et sole de l’île d’Yeu, oursin vivant et coquille Saint-Jacques de plongée de Norvège : le produit, tant célébré partout et tout le temps dans la littérature gastronomique, atteint ici une vérité rare. Toute la philosophie de Bruno Verjus, personnage charismatique et aux vies multiples, repose sur cette quête du goût : choisir les plus beaux produits, les cuisiner avec humilité. Prenons par exemple ce rouget farfouilleur Rossini, relevé d'un jus de têtes et d’arrêtes monté comme une royale avec les foies des rougets, avec un foie gras poêlé -un plat remarquable aux mariages de saveurs judicieux, sous son apparente simplicité. Bruno Verjus parle d’ailleurs de chacun de ses fournisseurs avec une petite lumière dans l’œil, avec l’envie de s’effacer devant l’artisan qui a produit la matière de son travail.

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L'art de Bruno Verjus ou le produit dans toute sa pureté © Olivier Decker / Michelin
L'art de Bruno Verjus ou le produit dans toute sa pureté © Olivier Decker / Michelin

Le chant gourmand de David Bizet à L’Oiseau Blanc (Paris, 16e)
Il aurait aimé inventer le lièvre à la royale (plat grâce auquel il a remporté un concours national) : c’est dire la passion de David Bizet pour les classiques de la gastronomie et sa… gourmandise. Au fil d’un repas à l’Oiseau blanc, la table de l'hôtel Peninsula,  on sent d’ailleurs à chaque plat une envie sincère de faire plaisir, loin d’une certaine cuisine de palace. Si l’exécution est toujours très cadrée, c’est la générosité qui prédomine : les sauces sont superbes, les produits irréprochables, et la technique, au service de l’émotion, ne tombe jamais dans la démonstration. Outre son homard bleu, tartare d’algues, rhubarbe et salicornes (une fulgurance), son turbot à la nage de safran, ses cocos de Paimpol et ses herbes, sa sauce à l’encre de seiche avec aïoli de poutargue, est une plongée en mer avec des saveurs aussi intenses que profondes. Le talent de la pâtissière Anne Coruble est manifeste sur cette feuille de tabac qui sert d’écrin à une préparation aérienne, garnie de mousse glacée à la vanille de Tahiti, espuma léger et petit condiment réduit de vanille caramélisée.

L'Oiseau Blanc, la table aérienne de David Bizet à l'hôtel Peninsula © Peninsula
L'Oiseau Blanc, la table aérienne de David Bizet à l'hôtel Peninsula © Peninsula

La croisière antillaise de Marcel Ravin au Blue Bay (Monaco)
D'un rocher à l’autre : tel est le titre de l’autobiographie que Marcel Ravin a publié en 2012. Né en 1970, à la Martinique, le chef s’épanouit désormais sur un autre « rocher », celui de la petite principauté de Monaco. Il y tient les cuisines d’un lieu superbe, le Blue Bay. Marcel Ravin, c’est l’exemple unique en France d’une fusion des cuisines caribéennes et des produits exceptionnels de la Côte d’Azur. Huile de roucou, blaff de poisson, cucurma, moringa, citronnelle, tamarin : les souvenirs des plats de sa grand-mère, des épices, des produits et des recettes de sa Martinique natale infusent chaque assiette d’une partition créative. À l’image de son blaff (un ragoût traditionnel de poissons) au délicieux fumet de poisson (à base de clou de girofle, de citron et d’oignon) et monté à l’huile d’olive, réalisé avec des murex (des escargots de mer), des coques et des langues d’oursin – le tout est accompagné d’une sauce addictive, un pain du lendemain transformé en chapelure et servi chaud. Alliant puissance (grâce au piment oiseau) et subtilité, le plat témoigne d’une réelle identité culinaire. Le repas parcourt à la fois l’histoire d’une île et de son terroir et, celle, personnelle, de la vie de Marcel Ravin, une prouesse justement couronnée de deux étoiles.

Marcel Ravin, le chef du Blue Bay à Monaco © Benjamin Vergely/ Blue Bay
Marcel Ravin, le chef du Blue Bay à Monaco © Benjamin Vergely/ Blue Bay
Copyright photo en-tête © Benjamin Vergely / Blue Bay

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