Comme pour bon nombre de ses confrères, Ivan Vautier, chef normand pur beurre au solide parcours, a dû se réinventer en cette seconde période de confinement imposant de nouveau la fermeture des bars et restaurants. Il propose une offre de vente à emporter loin de laisser insensible… Chaque semaine, il propose un menu à 30€ et des plats à la carte (de 13€ à 17€ pour les entrées, de 15€ à 32€ pour les plats et 8€ pour les desserts), proposés et mis à jour sur le site internet de l’établissement ainsi que sur sa page Facebook.
Le menu à 30€ (entrée/plat/dessert) change chaque semaine. Les plats de la carte reprennent les produits phares et parfois nobles qu’aime travailler le chef (Saint-Jacques normandes, foie gras, ris de veau…), et que l’on retrouve généralement lorsque l’on a l’occasion d’aller dîner dans son établissement, complétés également de quelques plats "tradition" (Blanquette de veau ; Paleron de bœuf cuisiné comme un gibier, garniture d’un bourguignon au foie gras) bien plus canailles.
Le jour J, à l’heure convenue, retrait sur place de la commande (à noter qu’il n’y a malheureusement pas de service de livraison de proposé…). Tout est prêt, soigneusement rangé dans des barquettes que l’on a forcément envie de découvrir une fois arrivé à la maison. On déballe et tout est bien là ; ni plus, ni moins… De petites feuilles blanches indiquent la marche à suivre pour apprécier au mieux chaque préparation. On apprécierait d’y trouver quelques propositions d’accords mets et vins pour être guidé complétement. D’ailleurs, pourquoi ne pas proposer également la vente de vin au moment du retrait de la commande ?
En souvenir d'un précédent repas, où j'avais dégusté un excellent saumon de la baie des Veys poché à 38°C, je me suis laissé tenter ce soir par le saumon de Cherbourg confit à l’huile d’olive, facturé 13€. Un appétissant filet de saumon qui est servi froid, simplement confit dans de l’huile d’olive. Un très bon produit, peu gras, avec une chair à la fois ferme et fondante en bouche, que l’on agrémente si besoin d’une vinaigrette de poivron rouge et de pomme verte crue taillés très finement. Quelques traits de ketchup de framboise au moment du dressage pour apporter une note sucrée intéressante, sans oublier les quelques framboises "pour la déco" à poser sur le saumon, dont on aurait néanmoins pu se passer à cette saison…

Vient ensuite le turbot sauvage de pêche côtière (30€), un épais filet de turbot préalablement rôti avec une plaisante coloration. 5-6 minutes au four à 160°C pour le réchauffer comme mentionné le rendent tout juste chaud, mais permettent aussi de ne pas apporter une surcuisson à ce produit noble de très belle qualité, à la chair ferme et subtile. Mais le chef, qui possède un savoir-faire indéniable, y a bien pensé, puisque la sauce au jus de turbot que l’on fait réchauffer à feu doux en casserole et que l’on vient verser sur le poisson permet d’y remédier. Une sauce parfumée au cidre de la ferme de Billy, près de Caen, et finement crémée, qui se marie tout aussi subtilement avec le turbot qu’avec le persil racine qui l’accompagne. Sans oublier, pour marquer encore plus l’attachement du chef au terroir normand, l’andouille de Vire qui apporte à ce plat "terre-mer" beaucoup de plaisir.

Enfin, voici la tarte fine au chocolat mi-cuit en dessert (8€), avec une pâte bien friable et un jeu de textures au chocolat tout en gourmandise. Elle satisfait, sans marquer autant que les plats précédents ; vivement tout de même que l’on puisse revenir au restaurant déguster le millefeuille "haut comme un gratte-ciel" qui nous a tant marqué lors de notre dernier passage…

Malgré des tarifs à la carte pas forcément donnés pour de la vente à emporter, la satisfaction est belle et bien présente, avec des produits de très belle qualité (justifiant aussi les tarifs), et de savoureux clins d’œil ici et là au terroir normand (saumon de Cherbourg, sauce parfumée au cidre normand, andouille de Vire…).
Petit bonus : le chef n'oublie pas l'ensemble de la filière et met en avant ses producteurs : il propose à la vente les pintades de son producteur de volaille Pierre Soetaert, mais aussi des paniers de légumes bio de son maraîcher de Créances.
