"Honnêtement, l’ordre de confinement m’a surpris. Je pensais qu’on tiendrait une semaine de plus. Je voyais que ça se détériorait à l’étranger, mais je n’y croyais pas. Ma compagne Hélène, qui est médecin, m’avait pourtant prévenu. Côté restaurant, on verra. Les urgences sont ailleurs. Je suis revenu chez moi, et j’avoue que ça me plait. Je répare les clôtures pour les chevaux, je taille les arbres, je m’occupe des poules, je fais à manger pour les médecins du CHU de Rangueil. Aujourd’hui, j’ai préparé un potimarron avec du quinoa, un crumble aux pommes et de la mousse au chocolat, parce que la mousse au chocolat remonte le moral.
“C’est la fin d’un cycle, le début d’un autre”
C’est l’année de mes deux étoiles, ça fait dix ans qu’on est installés, c’est la fin d’un cycle, le début d’un autre. Bien sûr, pour les finances, comme beaucoup de mes confrères, c’est plus compliqué, mais je vais trouver une solution. Pour l’instant, je vis au jour le jour, pas le choix. Je me dis que ça pourrait bien plus grave. On n’est pas bombardés ! Il faut rester serein, je pense que le président Macron a globalement fait le job. C’est difficile d’arrêter un pays comme la France. Certaines personnes manquent de retenue. Une fois que ce sera fini, on verra ce qu’on peut faire. Aux Etats-Unis, si tu n’as pas d’argent, tu es à la rue. On est le seul pays qui a été obligé de durcir le ton pour qu’on confine vraiment les gens ! C’est quand même un drôle de peuple, les Français, attachant mais compliqué. C’est peut-être pour ça qu’on aime tant se retrouver à table : on adore avoir des avis contraires sur tout… et bien manger !"
Pierre Lambinon est le chef de Py-r, à Toulouse.
