Spécialistes reconnus des champignons, des céréales et des légumineuses, Régis et Jacques Marcon sont aussi des cueilleurs hors-pair dans les prés autour du restaurant et sur le plateau du Mézenc. Ils y embarquent souvent leurs équipes pour leur apprendre l’art et la manière de cueillir, de découvrir les variétés comestibles et leurs goûts. Défenseurs d’un terroir, d’un territoire où la nature a pris le pas sur l’homme, ils ont depuis peu une nouvelle casquette, celle de jardiniers. C’est surtout Jacques qui avait cette envie. Mais à 1 200 m d’altitude, difficile de faire pousser quoi que ce soit. À 10 minutes de Saint-Bonnet-le-Froid, il a découvert le lieu-dit Gambonnet, qui par son exposition et son climat, était idéal pour créer un jardin potager. Sur les 12 hectares de cette parcelle qu’il a fallu défricher, 0,8 hectare ont été aménagés en jardin potager : "L’idée n’est pas d’être autosuffisant car tout ne pousse pas sur cette terre même si elle est enrichie par le compost engendré par le déshydrateur thermique du restaurant", précise Jacques.

Il a confié à Carine le soin de faire pousser des herbes aromatiques, des courgettes, des carottes, du mesclun, du fenouil, des pommes de terre : "C’est elle qui gère, elle fait à son rythme et à sa façon. Je ne l’oblige pas à faire pousser telle ou telle variété parce que j’en ai besoin dans les différents établissements. Je prends ce qui pousse, ce qui me permet de conserver des liens avec les maraîchers qui sont à nos côtés depuis longtemps." Depuis peu, la surface cultivable est passé à 1,2 hectares et ce sont essentiellement le restaurant gastronomique et la boulangerie qui en bénéficient. Mais le projet ne s’arrête pas là, bientôt les écoliers de Saint-Bonnet-le-Froid pourront apprécier ces délicieux légumes. Et Jacques d’ajouter : "Ce jardin crée aussi de l’emploi. Après Carine, un nouveau jardinier devrait rejoindre Gambonnet l’année prochaine".

Vous avez investi très tôt dans un déshydrateur thermique. Quel bilan tirez-vous de cet investissement ?
Cela fait plus de six ans que nous avons fait l’acquisition de ce déshydrateur de déchets alimentaires d’une contenance de 140 kg et nous constations aujourd’hui que nous avons réduit nos déchets de près de 60 % tout en récupérant 40 kg d’engrais organique à chaque fois que nous le mettons en route. Un engrais que nous destinons au jardin, à condition de le mélanger avant avec des feuilles mortes afin de réduire sa puissance.

Vous avez également changé votre fusil d’épaule sur le recyclage des déchets plastique et sur les papiers.
On incite les professionnels et les particuliers à faire le tri, ce qui est une bonne chose, mais quand j’ai appris par des professionnels de ces filières de recyclage qu’une partie de notre tri était enfouie à l’autre bout du monde et pas recyclée, j’ai trouvé ça scandaleux. On y consacre du temps pour finalement découvrir que ces déchets ne sont pas valorisés comme on pourrait l’imaginer. J’ai alors pris contact avec l’association Elise à Saint-Etienne qui récupère et recycle les plastiques, l’aluminium et le papier tout en étant engagée dans l’insertion professionnelle de personnes handicapées de plus de 50 ans.

Quels arguments utiliseriez-vous pour convaincre des confrères peu impliqués dans le recyclage ?
On ne peut pas claironner à droite et à gauche vouloir défendre le terroir, les producteurs locaux, la nature… et jeter en parallèle sans trier ou recycler. J’invite les professionnels qui ne le font pas à calculer le poids hebdomadaire de leurs déchets. Ils seront effarés de voir le résultat. Et quand on le multiplie par 52 semaines, on ne parle plus en kilos mais en tonnes. Trier, recycler, réduire le gaspillage, c’est participer à la préservation de tout l’écosystème qui nous entoure.