Thibault Sombardier s’en défend : "Non, Antoine n’est pas un restaurant de poisson", explique-t-il, chaussé de bottes blanches et d’un ciré, prêt à partir en quête des meilleurs produits de la mer pour son restaurant du 16e arrondissement de Paris. Ce Lyonnais d’origine est aussi attaché à la terre, aux beaux produits, à la saisonnalité, mais lorsque la parole se délie, il est souvent question de poisson. Les tricholomes de la Saint-Georges ne sont-ils pas mariés à un homard ? Les blettes se transforment en farce pour un chapon de Méditerranée accompagné d’un jus de bouillabaisse. Alors certes, la viande ne fait pas défaut à la carte du restaurant Antoine, mais les poissons y sont tout de même omniprésents. Il est passé par les plus grandes cuisines : celles de Marc Meneau à Vézelay, celles du Meurice à Paris aux côtés de Yannick Alléno, et celles du Carré des Feuillants avec Alain Dutournier, mais c’est Bernard Constantin dans le Rhône, qui lui a appris à travailler le poisson.
Les plats de Thibault Sombardier sont travaillés méticuleusement car le chef a l’âme d’un technicien. "Enfant, je passais tout mon temps à inventer autour des Lego". Et c’est toujours ainsi qu’il conçoit sa cuisine. Un véritable jeu de construction, comme en témoigne la brioche qui accompagne le turbot. Il s’agit d’une superposition de fines couches de carotte, céleri, topinambour, petits pois et mimolette au cœur d’un feuilletage aérien. Elle est découpée à table et déposée à côté d’un tronçon de turbot au beurre mousseux à la moelle, oseille et purée de chou-fleur. Les Lego ne sont pas loin.
“Quand on a goûté au saké, il est difficile de faire marche arrière et de revenir au vin blanc”
Turbot mais encore langoustine, daurade, bar, barbu, encornet sont régulièrement à la carte. Et comme le chef aime étonner, guider ses clients vers de nouvelles découvertes gustatives, il n’hésite pas, de concert avec son sommelier Fabien Vullion, à proposer des sakés sur ses plats de la mer. "J’ai découvert des accords incroyables entre des produits de la mer comme les oursins, les ormeaux et des sakés lors d’un déplacement professionnel au Japon. J’ai notamment dégusté des sakés doux avec des saveurs iodées. Le contraste m’a beaucoup plu." De retour à Paris, le chef décide de mettre cette boisson à la carte. Maryam Masure, qui importe la boisson en France via l’Atelier des sakés, aide le chef et son sommelier à sélectionner les bonnes bouteilles. "Il existe tellement de sakés différents qu’un accord avec les produits de la mer est toujours possible. Et quand on y a goûté, il est difficile de faire marche arrière et de revenir au vin blanc", explique Maryam Masure. Elle poursuit : "Lorsque j’ai découvert la délicatesse de la cuisine de Thibault Sombardier, j’ai de suite pensé que le saké était la boisson la plus à même de souligner chacune des saveurs subtiles qu’il met en avant."
Le saké, tout en finesse, n’emporte pas le palais pour laisser place à l’iode
La première entrée, pétales de champignons, poisson en fines tranches, concombre mariné et lait fumé au caviar s’accorde avec un Junmai tokubetsu homare kirin de la brasserie Kaetsu Shuzo. Ce saké est élaboré avec un des meilleurs riz, le gohya kumangoku qui donne des sakés minéraux en attaque et une fin de bouche très sèche. C’est un saké épuré, clair et légèrement parfumé avec de légers arômes au nez de roche volcanique. Fabien Vuillon le propose aux clients car "en début de repas, le palais ne doit pas être trop pris. Par sa finesse et sa délicatesse, ce saké donne une sensation d’eau pure avec des informations complémentaires qui se révèlent progressivement."
Des accords de textures entre l’onctuosité de la seiche et la rondeur du saké
La dégustation se poursuit avec un pain soufflé de merlan, cœur d’amande grillée accompagné d’une eau de tomates. Cette entrée signature du chef est un clin d’œil à ses origines lyonnaises, car on est en présence ici d’une quenelle revisitée. Il est décrit par le sommelier comme un plat avec beaucoup de caractère qui mise sur le côté végétal mais qui offre une belle matière et une sensation moelleuse en bouche grâce à la seiche avec laquelle est préparée la quenelle. Le plat est par ailleurs farci de merlan. Il se marie avec un junmai daiginjo, homare kirin, de la brasserie Kaetsu Shuzo. Ce saké élaboré avec un riz poli à 50% est très accessible en bouche. Il offre une belle rondeur et un beau fruité. Comme tous les daiginjo, il enveloppe le palais et offre un certain gras qui s’accorde à merveille avec la quenelle de seiche.
Enfin, l’aiguillette de saint-pierre cuite à vif, beurre d’herbes parfumées, blette et carotte condimentées, fin ragoût de coquillages en curry vert est une évidence avec le Junmai Genshu de la brasserie Miha Imada Shuzo. Ce saké élaboré par une femme est tout en finesse. Il est réalisé selon des techniques traditionnelles et élaboré avec des souches de riz très anciennes qui n’avaient pas été cultivées depuis 100 ans. On obtient ainsi un saké doux en bouche, aromatique, avec une très légère acidité et presque des notes citronnées. C’est un saké qui a été pensé pour se marier avec les poissons et les fruits de mer, comme l'indique l’étiquette. "Un vin blanc avec ce plat serait bon, mais je suis sûr qu’on perdrait quelques notes de salinité que le saké met en exergue", conclut le sommelier.
Restaurant Antoine, 10 avenue de New York, 75016 Paris.
Le saké multiplicateur de saveurs !
Le palais est capable de reconnaître cinq saveurs, le salé, le sucré, l’acide, l’amer et l’umami, littéralement "goût exquis" car il met en valeur les quatre autres. L’umami provient essentiellement des acides aminés qu’on retrouve beaucoup dans les protéines. Etant élaboré avec du riz, le saké fait ressortir l’umami, car il contient de l’amidon, lui-même riche en protéines et en acides aminés. Mais surtout il en contient cinq fois plus que le vin blanc. Aussi, met-il particulièrement en valeur les produits qu’il accompagne comme les poissons et les crustacés.
Cet article est sponsorisé par The Japan Food Product Overseas Promotion Center (JFOODO)