Reportages 2 minutes 02 juin 2023

Saké is the new wine

Le saké a fait, ces dernières années, une apparition remarquée à la carte des restaurants. Les tables japonaises, bien sûr, lui font la part belle, mais aussi des adresses plus traditionnelles, qui proposent des accords mets et saké, comme le Solstice d’Éric Trochon. Une expérience à tenter…

C’est au cours de ses voyages que le chef, Meilleur Ouvrier de France 2011, professeur à l’école Ferrandi à Paris, découvre le saké. Éric Trochon, propriétaire de Solstice, table étoilée dans le 5ème arrondissement à Paris, est tombé amoureux du saké. « J’ai découvert le saké à Tokyo, à l’époque où, en France, dans les restaurants asiatiques, on ne servait qu’une boisson qu’on appelait aussi saké, mais qui n’avait pas grand-chose à voir avec ce dont je parle. ». La confusion perdure encore aujourd'hui entre le saké chinois, un alcool distillé à base de sorgho et le saké japonais ou vin de riz, une boisson ancestrale japonaise obtenue par lente fermentation. Les Japonais la nomment nihonshu, « saké » étant le terme générique pour désigner un verre d’alcool.

Sur quels genres de plats préconisez-vous le saké ?
« J’ai découvert que sur un accord, par sa richesse et sa complexité, le saké passe souvent mieux que le vin. Par exemple, j’ai au menu un foie gras chaud avec un bouillon dashi aux algues. Je propose un accord avec un saké car le vin peine sur ce genre de plat. L’acidité du saké donne de la fraîcheur en bouche et marche bien sur les plats gras. Je le propose aussi pour accompagner une échine de porc. Sur les desserts, il fonctionne bien avec le praliné et le caramel. ».

Éric Trochon. Crédit photo : Solstice
Éric Trochon. Crédit photo : Solstice

Est-ce que la cuisine française se marie bien avec le saké ?

« Notre cuisine se caractérise par de nombreuses sauces, très variées, ce que l’on ne retrouve dans aucune autre cuisine au monde, c’est vraiment l’ADN de la cuisine made in France. Sur un poisson cuisiné avec son beurre blanc, par exemple, le saké fait merveille. Le saké et le vin cohabitent sur la carte mais il faut y aller progressivement. Dans mes propositions d’accords mets et vins, je conseille un ou deux sakés. Les Français sont culturellement attachés au vin. On propose des Junmai Ginjo et des Daiginjo, sakés japonais haut de gamme, mais qui restent accessibles, en termes de prix, mais aussi de goût, avec des notes aromatiques, pas trop élevés en alcool et bien équilibrés. ».

Keiichiro Miyagawa - Crédit photo : Galerie K
Keiichiro Miyagawa - Crédit photo : Galerie K

L’avis de l’expert
Keiichiro Miyagawa, fondateur de l’École des Maîtres du Saké à Paris et importateur de saké (Galerie K). Élu sakesamuraï en 2020.

Qu'est-ce que le saké exactement et comment le fabrique-t-on ?
« Le saké est une boisson fermentée à base de riz, eau et kôji, un ferment et non une boisson distillée comme on le croit souvent. Il existe de nombreuses de variétés de riz à saké et l’un des secrets de fabrication réside dans le degré de polissage des grains de riz. Après lavage, le riz est trempé, égoutté, puis cuit, refroidi et ensemencée avec le kôji, un champignon spécifique qui permet la transformation de l’amidon en sucre. On y ajoute de l’eau et des levures. Une douzaine de jours sont nécessaires à sa maturation. ».

Quel est la place du saké aujourd’hui en France ?
« La consommation de saké en France a explosé ces dernières années. Le pays est en 12ème position sur la liste des importateurs de sakés dans le monde et la tendance est à la hausse. Dans les années 1990, on ne trouvait du saké que dans les restaurants japonais, fréquentés par des clients japonais. On le dégustait dans une petite coupe. Depuis 2007, on le boit dans un verre à pied comme le vin. Puis dans les années 2010, on a commencé à le trouver sur les grandes tables. De manière générale, l’offre de restauration asiatique, cuisine chinoise, pho, bibimbap, et plus particulièrement japonaise, sushis et sashimis, fait partie de la vie des Français et augmente l’intérêt des gens pour l’alcool nippon. On trouve aujourd’hui du saké chez les cavistes. La gastronomie française a aussi beaucoup évolué en 30 ans : elle s'est allégée, il y a moins de gras, de sucre, de sel, on est plus sur des tendances végétales. Et on a découvert l'umami, la 5ème saveur. Tous ces changements sont favorables au saké qui se marie bien avec une cuisine saine et légère. Le saké est parfait sur des notes acides (qui s'allient mal avec le vin), avec les goûts fumés, l'amer, les saveurs iodées, les plats relevés et épicés, les œufs et l'umami, bien sûr ! ».


Foie gras chaud avec un bouillon dashi aux algues, restaurant Solstice.
Foie gras chaud avec un bouillon dashi aux algues, restaurant Solstice.

Hero image :  Galerie K.

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