Incontournable, le chef Massimo Bottura s’est forgé une réputation dans le monde entier ; et un succès qui s’est vu couronner d’une troisième étoile MICHELIN en 2012. Sa cuisine a mis les traditions culinaires d’Emilie sous les projecteurs, avec une grande précision mais sans nostalgie. Dans ses préparations se côtoient des influences de ses propres voyages et des diverses cultures de son équipe, et une réelle touche artistique. L’atmosphère de son restaurant de la Via Stella à Modène est intime, distillée dans des salles sobres parsemées d’œuvres d’art.
Une cuisine du terroir et d’ailleurs…
« Le changement doit partir de nos gestes du quotidien, pour que l’on puisse influencer nos convives et ainsi sensibiliser des communautés entières. On doit impulser la transformation complète de notre système alimentaire en un autre, plus sain et plus durable », affirme Massimo Bottura.
Dans son restaurant, le temps joue un rôle primordial : on y consacre une grande attention au passé, afin de préserver ce qui doit être perpétué et de le transmettre aux générations futures. Jadis, lorsque dans les périodes de disette il était nécessaire de tuer le cochon de la famille, un vrai Emilien savait que toutes les parties devaient être utilisées, sans exception, pour ne rien en perdre. Un cochon valait de l’or ! De même, un morceau de pain dur avait alors une grande valeur.
Le chef résume ainsi sa philosophie : « Notre culture nous donne les bonnes réponses si nous savons poser les bonnes questions. La culture génère de la connaissance, la connaissance apporte une sensibilisation et la sensibilisation crée un sens des responsabilités. Des responsabilités envers soi, envers les autres, et envers tout ce qui nous entoure et les conséquences pour notre planète. Ce n’est que de cette manière que nous parviendrons à créer le changement : en partant de la conscientisation de nos gestes quotidiens.” C’est cet engagement habite Massimo Bottura au quotidien.
Dans le potager du restaurant, on trouve des fleurs comestibles, des légumes et des salades, ainsi que les herbes aromatiques qui servent à donner davantage de saveurs à de fabuleuses préparations comme le bœuf Bue Grasso accompagné d’un mariage d’herbes et de légumes, crème de pommes de terre et sauce au vin rouge. En outre, les roses du jardin sont fermentées et ajoutées à un vinaigre spécial utilisé pour parfumer la ricotta al forno.
« Nous aimons chaque jour nous salir les mains et nous inspirer des produits naturels de saison que nous fournit notre terre », explique Bottura. « Il n’y a rien de plus durable que cela. » Mais ce n’est qu’une partie de l’histoire…
Une autre façon de penser durable
La philosophie de l’Osteria Francescana va bien au-delà de la créativité culinaire : l’objectif premier de ce restaurant trois étoiles est de limiter au maximum le gâchis alimentaire. Un message qu’il transmet maintenant à la société dans son ensemble avec le développement de son projet social et culturel Food for Soul, qu’il mène avec sa femme, Lara Gilmore, et qui a conduit à l’ouverture du Refettorio Ambrosiano en 2015, dans le cadre de la Milan Expo.
A l’origine de cette association à but non lucrative, il y avait l’idée de créer 12 espaces de soutien aux plus vulnérables, à Milan, Modène, Bologne, Naples, Paris, Londres, Genève, New York, San Francisco, Mérida, Sydney et Lima. Chaque « refettorio » vise à aider la communauté locale à lutter contre le gâchis alimentaire et l’isolement social à travers la beauté. Les convives sont accueillis dans des espaces abandonnés auxquels on a donné une nouvelle vie grâce au travail de designers, d’architectes et d’artistes. Les repas servis sont préparés avec les excédents alimentaires, qui, sans cela, auraient été jetés et qui sont transformés par les chefs en des plats sains et nourrissants que l’on sert aux membres les plus vulnérables de la communauté.
« Le pain, c’est de l’or » : la quintessence de la recette zéro déchets
Originaire de Ligurie, le pesto est l’une des recettes italiennes les plus célèbres et les plus appréciées. Et si le pesto servi au Refettorio Ambrosiano est un peu différent du pesto traditionnel, c’est une recette à la fois simple, incroyablement savoureuse et facile à préparer chez soi. C’est un plat plein de sens, car il représente tout le travail réalisé dans chacun des « réfectoires » de par le monde. Un jour, l’équipe de l’Osteria Francescana qui travaillait au Refettorio Ambrosiano a décidé de préparer un plat de pâtes au pesto afin d’utiliser du basilic qui avait un peu perdu de sa fraîcheur. Mais comme il n’y avait pas assez de feuilles de basilic pour la recette, les chefs se sont tournés vers d’autres herbes, comme la menthe, le persil, le thym et d’autres herbes aux saveurs délicates. Ils ont alors réalisé qu’il leur manquait aussi des pignons. Massimo Bottura a alors eu l’idée d’une option alternative : « Et si on utilisait de la chapelure ? Il n’y a pas de meilleur moyen de réutiliser un ingrédient aussi précieux que le pain que de le transformer en chapelure ». Il ne restait qu’à ajouter la touche magique, l’huile d'olive extra-vierge, et à saupoudrer généreusement le tout de Parmigiano Reggiano, pour obtenir la recette zéro déchets par excellence ! Cette spécialité a depuis été préparée à de nombreuses occasions pour les repas du personnel de l’Osteria Francescana.
Le café, pour finir un repas en douceur !
Le café, célébré dans la chanson napolitaine « la tazza è cafè », a un rôle particulier à table, surtout après un repas copieux : une gorgée de café offre au palais un dernier arôme intense et durable tout en fournissant à l’esprit et au métabolisme un regain d’énergie grâce aux polyphénols. Une sensation encore amplifiée quand cet ingrédient essentiel vient aromatiser un précieux dessert, comme la zuppa inglese de Bottura, l’un des desserts traditionnels favoris de la région : chocolat chaud et froid, crème pâtissière, génoise, un soupçon d’Alkermes et du café illy 100% Arabica, un café durable et de première qualité qui « accompagne » le dessert plutôt que de le dominer.
Bon appétit!
