Il a ce qu’on appelle une "tronche". Des cheveux en bataille, de profondes rides d’expression sur le front et la carrure du footballeur qu’il a été. Mais le chef a aussi une "grande bouche". Il en fait la démonstration permanente dans l’émission Hell’s Kitchen (Cauchemar en cuisine, pour la version française), diffusée dans 120 pays. On le regarde sauver de la faillite de médiocres restaurateurs, au prix d’une refonte totale de leur établissement (de la décoration à la carte) et surtout d’un coaching brutal des propriétaires, ponctué de prises de bec testostéronées.
L’émission en a fait le chef le plus connu de la planète. Avec 6 millions de followers sur Instagram et presque autant sur Twitter, il rembarre sans précautions – et avec un humour décapant – ceux qui lui soumettent avec fierté les photos de leurs piètres plats… Gordon Ramsay est une sorte de rock star des fourneaux, façon vedette hollywoodienne. Certains le trouvent odieux, d’autres perfectionniste : c’est surtout un acharné de travail (16 heures par jour, six jours sur sept, clame-t-il) qui a construit un empire de 35 établissements dans le monde, gastronomiques ou à thèmes, en franchise ou directement sous son nom.
“Certains le trouvent odieux, d’autres perfectionniste : c’est surtout un acharné de travail”
Avant de se distinguer par ses provocations médiatiques et son intransigeance, Gordon Ramsay sidère surtout par son insolente réussite. L’homme de 52 ans, d’origine sociale modeste, a fait ses classes en France et donne tout à son métier. Il est désormais plus connu que son mentor français Guy Savoy, qui lui a mis le pied à l’étrier, mais qui a obtenu sa troisième étoile après lui. Il est aussi passé par les cuisines de Joël Robuchon avant de monter, à 26 ans, son premier restaurant, pour lequel il décrochera vite deux étoiles. Sa première adresse gastronomique dans le quartier de Chelsea, à Londres, obtiendra en 2001 la consécration des trois étoiles. Francophile, il supervise aussi les cuisines du Trianon Palace à Versailles et celles du Pressoir d’Argent, de l’InterContinental de Bordeaux.
On pourrait croire sa machine bien huilée et son chemin tracé. Gordon Ramsay a pourtant été chahuté pour son franc-parler et ses méthodes parfois musclées. Mais le chef tout-terrain sera toujours sauvé par la qualité de sa cuisine : il peut notamment s’appuyer sur quelques beaux plats signatures, comme ceux figurant à la carte du Trianon Palace : turbot sauvage au lard de Colonnata, mousserons de la Saint-Georges, petit pois et garganelli d’ortie, pigeonneau de Vendée rôti, cerises et navets glacés, condiment oseille, sauce porto, ou encore le chocolat glacé à la citronnelle, croustillant à la fleur de cacao...
Illustration de l'article : © Terence Patrick/CBS via Getty Images