« Il est facile de travailler avec du local en Belgique » déclare Georges Athanassopoulos. « En termes de durabilité, nous pouvons être très heureux de vivre ici. Parfois, les gens n'en sont pas assez conscients. Par exemple, l'agriculture biologique fait l'objet d'une grande attention et ne cesse de se développer. Il suffit de regarder le large éventail de supermarchés bio : on n'en trouve pas en Allemagne ou aux Pays-Bas. Je me rends compte que nous avons de la chance d'avoir tous ces beaux produits à proximité. »
On peut qualifier le chef du Màloma d'homme passionné et amoureux de la gastronomie. Du travail acharné, des journées bien remplies, des clients heureux. Pour lui, c'est le moyen idéal de transmettre des valeurs. Par le choix des produits locaux, le respect de son terroir, l'artisanat qu'il met à l'honneur. Ses passages dans des établissements comme L'Air du Temps ou le traiteur Belgobon ont façonné sa vision.
« Nous mettons nos producteurs en avant, tant sur la carte que dans l'assiette. Nous essayons de faire passer discrètement un message à travers le choix de nos produits. Ici, vous ne mangerez pas de poisson issu de la surpêche. Ce n'est pas que nous le proclamions à table, mais nous le disons bien sûr si le convive a des questions. Notre idée est de convaincre les gens par l'assiette. C'est ainsi que nous nous exprimons. Notre premier objectif est d'avoir une entreprise bien gérée qui associe la durabilité à la gastronomie. Nous montrons ainsi aux jeunes chefs qu'ils peuvent ouvrir de telles entreprises à l'avenir et même aller plus loin. »
La volonté d'avoir le moins d'impact négatif possible sur le climat est omniprésente au sein de Màloma. Bien entendu, ils sont conscients qu'il s'agit d'un défi quotidien. Après tout, il est aujourd'hui très difficile de travailler avec de l'énergie verte au cœur de Schaerbeek. « Je veux être honnête à ce sujet. Chacun a sa propre définition de la durabilité. L'impact écologique ne se limite pas aux émissions carbone. Nous optons pour une production locale, mais raisonnée. Je pense que l'avenir appartient aux végétariens, mais nous proposons une gamme modeste de poissons et de viandes. Ce faisant, nous mettons également en avant notre terroir. Par exemple, un beau morceau de viande peut faire prendre conscience que la viande bon marché n'est pas normale. Il n'y a pas une seule vérité ou une seule façon de faire. »
« Prenons l'exemple du lait et du beurre. Nous avons choisi de continuer à travailler avec ces produits, qui proviennent de petits producteurs biologiques wallons. Une ferme, c'est quelque chose que j'apprécie. Nous ne voulons pas de substituts qui consomment beaucoup d'énergie. Nous avons beaucoup de valeurs, mais il faut savoir faire des concessions de temps en temps. »
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Au Màloma, établissement de petite taille, la cuisine créative se fait dans une cuisine minimaliste. Juste ce qu'il faut pour les 22 à 25 convives qui s'y attablent chaque jour. Le chef Athanassopoulos considère des personnes comme Caroline et Nicolas de Humus x Hortense comme des pionniers, des leaders d'opinion dont la vision s'étend à d'autres chefs bruxellois. Mais il voit également une autre source d'inspiration dans le changement de mentalité qui s'opère actuellement chez de nombreux cuisiniers. « Ma génération, née en 1985 et après, a vu ‘An Inconvenient Truth’ en 2004. Un documentaire qui a eu un grand impact. Mais les jeunes d'aujourd'hui vont encore plus loin. Une évolution s'est produite. Le fait qu’un établissement comme le nôtre existe est représentatif de la société d'aujourd'hui. »
« Nous sommes à Bruxelles, la capitale de l'Europe. Le Conseil européen, les marches pour le climat : tout se passe ici. Nous sommes une ville dont l'impact écologique augmente. Je constate donc que les gens sont ouverts à une vision durable. Mais en tant que restaurant, nous faisons 5 000 couverts par an, nous ne faisons pas la différence. Ce sont nos producteurs qui ont un impact beaucoup plus important. C'est pourquoi nous voulons être une vitrine pour leurs produits. »
Bien que certaines peintures accrochées dans le restaurant mettent en avant la lutte pour la préservation de la friche Josaphat, un endroit vert important à Schaerbeek menacée par un projet immobilier, la vision du Màloma est communiquée de manière plutôt subtile. À une époque où l'on met souvent l'accent sur la durabilité, certains préfèrent rester sous le radar pour éviter d'être accusés d'écoblanchiment. Même si ici, ce n’est pas le cas. « Je veux que les gens viennent pour la bonne nourriture. C'est la meilleure publicité pour le développement durable, et non le message que vous opérez de manière durable. Je préfère que les clients demandent des explications lorsqu'ils sont convaincus par l’assiette. »
« Nous devons déconstruire notre mode de vie et de consommation, décroitre notre vitesse de croisière et revenir à des choses qui étaient normales auparavant, comme la fermentation et la cuisine avec des légumes locaux. Attention, l'industrialisation a aussi apporté de bonnes choses. Nous devons retrouver un équilibre. J'espère que nous pouvons y contribuer. »
Head Photo ©Sarah Geerits