Gastronomie durable 4 minutes 10 décembre 2021

Sang Hoon Degeimbre met l’accent sur l'être humain

La durabilité, la nature et l’humain. Ces sujets sont au cœur des projets ambitieux de Sang Hoon Degeimbre. Le chef de L'Air du Temps, restaurant aux deux étoiles MICHELIN, a encore beaucoup d’idées pour le futur. Il ouvrira, par exemple, un nouveau bistro à Liernu l'année prochaine.

« Je le dis depuis des années : après les tendances espagnole et nordique, l'aspect humain devient la nouvelle tendance de la gastronomie » déclare le chef Degeimbre. « Tant en ce qui concerne les convives que nos équipes. Pour moi, la cuisine est une question de technique, de produit et d'émotion. Et seul l'homme peut générer cette émotion. Ce sont les gens qui font la différence dans les derniers détails. Qu'est-ce que c'est exactement ? C'est quelque chose d'intangible. En tant que chef, vous faites appel à l'estomac des gens, à leur "cerveau émotionnel". Mais les clients veulent une expérience complète. Nous travaillons encore plus dur sur ce point maintenant. »

Les confinements ont fait réfléchir le chef San. Il a commencé à travailler dans son jardin, a ouvert une boutique et a fait des plats à emporter. Dans le même temps, il a également commencé à travailler plus en profondeur. C'est un homme qui veut toujours aller de l'avant et qui déborde d'idées.

« Je pense que les gens sont devenus plus curieux en étant enfermés. Ils veulent participer davantage à leur expérience dans un restaurant. Nous avons un jardin de cinq hectares, mais les gens ne peuvent pas en faire l'expérience. C'est bizarre, non ? C'est pourquoi nous voulons laisser les clients voyager davantage dans le restaurant. Faire du storytelling. Leur faire comprendre ce que font les quarante personnes qui travaillent ici. Nous allons également travailler avec des petits cadeaux, comme un livret de collection qui leur fournit plus d'informations. Nous allons déployer ce système encore davantage. Aujourd'hui, plus que jamais, le détail est important. »

Sang Hoon Degeimbre ©Schrodinger Studio
Sang Hoon Degeimbre ©Schrodinger Studio

L’envie d'expériences est également présente dans les coulisses. Les chefs et les serveurs veulent faire l'expérience de tout ce qu'ils voient sur les médias sociaux. Le Chef Degeimbre leur donne la liberté pour le faire. Il n'est pas favorable au fait de garder le personnel avec lui (trop) longtemps, avec le risque qu'il tombe dans la routine. « Je préfère me concentrer sur la transmission. Quand quelqu'un travaille ici, je lui demande d'être loyal. Vous partez quand vous voulez, mais dites-le à l'avance et transmettez vos connaissances à votre remplaçant. De cette façon, chacun est à la fois élève et professeur. »

En tant que propriétaire de L'Air du Temps, San Sablon, Toshiro, Vertige et Rizom (San Gent est actuellement fermé), le chef Degeimbre a la possibilité d'offrir à ses employés l’occasion d'acquérir de nouvelles expériences. L'année prochaine, il ajoutera même un nouveau bistro, sur le site de son restaurant aux deux étoiles MICHELIN. « Nous avons lancé ce projet pour trouver un meilleur équilibre dans nos heures d'ouverture. L'idée est de proposer au moins sept services dans le bistro et sept dans le restaurant gastronomique. Ainsi, il y aura toujours un commerce ouvert chaque jour à cet endroit. Le bistro sera situé dans le bâtiment où nous servons actuellement le petit-déjeuner. Nous aimerions ouvrir l’année prochaine, mais la date est encore à déterminer. On doit encore installer une nouvelle cuisine, entre-autres. »

« Les plats seront basés sur un maximum de trois produits. Bien entendu, en étroite collaboration avec notre jardin et nos fournisseurs locaux. Nous voulons offrir des combinaisons qui sont familières mais aussi surprenantes. Pensez par exemple aux betteraves confites, la bière brune et le pain d'épice. Quand on goûte ces ingrédients ensemble, on pense immédiatement aux carbonades flamandes. Ou prenez le topinambour grillé avec du jaune d'œuf et de l'estragon. C'est le goût de la béarnaise, mais différent. Le bistro sera amusant, vivant et dynamique. »

L'Air du Temps ©Betty Marais/L'Air du Temps
L'Air du Temps ©Betty Marais/L'Air du Temps

La question du parking visiteurs de L'Air du Temps sera également envisagée. Il sera caché derrière un jardin qui n'a pas encore été créé et qui sera également doté d'une terrasse. L'impressionnant potager évolue, quant à lui, au fil des saisons. Six jardiniers collectent chaque année jusqu'à quatre cents variétés de fruits et légumes. L'étoile verte MICHELIN Degeimbre a l'ambition d'aller encore plus loin dans la durabilité.

« Nous voulons devenir le premier restaurant entièrement durable. Produire notre propre énergie, par exemple. Travailler avec l'énergie géothermique, installer des boîtiers avec des hélices dans nos buissons pour attraper le fort vent d'ouest. Nous voulons aller encore plus loin dans le recyclage de notre eau. Tous ces projets nécessitent un travail énorme, qui prendra du temps. On se tourne toujours vers les politiciens pour trouver des solutions, mais nous jouons également un rôle. Notre restaurant nourrit 12 000 à 15 000 personnes par an. »

Le chef Degeimbre traite également de sujets similaires aux Grandes Tables du Monde, où il siège au conseil d'administration et est responsable, entre autres, de la stratégie en matière de responsabilité sociale et d'environnement. En collaboration avec l'organisation, il réfléchit aux défis de demain. C'est aussi un moyen très agréable de rencontrer des collègues. « J'ai une admiration partagée avec ces collègues. Par exemple, lorsque je partage avec Dominique Crenn ce sur quoi nous travaillons, lorsque je discute avec Anne-Sophie Pic de notre sensibilité commune, ou que je demande à Glenn Viel où en est son saucisson de betteraves rouges (ne manquez pas de suivre leur "compétition" sur Instagram, ndlr). Quand nous nous réunissons, on entend des idées que l’on peut travailler soi-même. Quelqu'un parle de mettre de l'aubergine dans le sel, par exemple, et moi, je vais faire mon truc avec ça et l'essayer avec du koji. C'est un enrichissement de pouvoir interagir avec ces collègues. »

L'huître au kimchi ©Betty Marais/L'Air du Temps
L'huître au kimchi ©Betty Marais/L'Air du Temps

Aujourd'hui, Sang Hoon Degeimbre est très impliqué dans le management. Il se rend compte que la tête est tout aussi importante que les mains. Même si, bien sûr, il reste un chef avant tout. C’est lui qui crée les recettes et réalise les fiches techniques. Pendant le service, il goûte beaucoup pour que la qualité soit toujours maintenue. Il a grandi dans ce rôle au fil des ans. « À un certain moment, vous vous rendez compte que vous devez vous stabiliser. Pas constamment créer de nouvelles affaires. Il y a cinq ans, nous cherchions encore notre voie. Aujourd'hui, nous avons une structure solide. J'ai trouvé ma façon de travailler. Il n'est pas nécessaire de surprendre constamment les gens. Parfois, je veux juste qu'ils soient heureux avec une bonne assiette de nourriture. C’est ce que l’on appelle la sagesse, je pense (rires). »

« Avant, je n'étais pas sûr à cent pour cent quand je présentais quelque chose. Maintenant, je teste davantage et je suis sûr à cent pour cent que c'est ce que je veux. C'est une question de confiance en soi. Quand j'ai commencé à cuisiner, tout était très compliqué, il y avait parfois vingt éléments dans l'assiette. Si vous n'êtes pas sûr de vous, vous en faites trop. Maintenant, je vais plutôt vers la simplicité. Bien sûr, je veux toujours progresser, mais de manière plus détaillée. À l'avenir, j'aimerais lancer un projet en Corée, mon pays d'origine. En tant que conseiller. Chaque fois que j’y retourne, quelque chose me parle. Il y a quinze ans, ma cuisine était à 95 % européenne et à 5 % coréenne. Aujourd'hui, je dirais 65-35. Je n’arrête pas d’évoluer. »

Illustration 'focus truite' ©Betty Marais/L'Air du Temps

Gastronomie durable

Articles qui pourraient vous intéresser