Reportages 1 minute 12 juillet 2024

Les confessions de Werner Loens : l’ascension de De Librije

Huit mille cinq cents repas pris dans plus de 20 pays, 3 600 séjours à l’hôtel, 20 000 rapports rédigés, 1,6 million de kilomètres parcourus en voiture… Le palmarès de Werner Loens, après trente-sept années en tant qu’inspecteur puis directeur de la sélection du Guide MICHELIN pour le Benelux, est impressionnant. Son histoire, inspirante, l’est tout autant. Aujourd’hui, il évoque l’ascension de De Librije à Zwolle.

Il y a quelques semaines, j'ai souligné les avancées remarquables des Pays-Bas dans le domaine culinaire. Un couple incarne à merveille cette évolution : Thérèse et Jonnie Boer. J'ai pu suivre le parcours de ce duo de choc tout au long de ma carrière en tant qu'inspecteur puis directeur du Guide.

Je me souviens parfaitement de ma première rencontre avec Jonnie Boer au Librije, alors tenu par monsieur Meijers. Une table prometteuse dans le scope du Guide depuis plusieurs années, mais qui n’avait pas encore atteint son plein potentiel. Jeune inspecteur, on m’avait confié la mission d’aller y manger puis d’engager la conversation avec le chef. Lors du repas, j’ai noté que la proposition culinaire et les produits étaient excellents mais qu’il manquait quelque chose pour prétendre à l’étoile. Après avoir réglé l’addition, je me suis présenté et rassis à table. Le patron a immédiatement fait venir le chef, qui allait bientôt prendre la relève.



J’ai expliqué que le niveau était bon mais qu’il manquait encore cette touche qui aurait permis de distinguer le restaurant. À ce moment-là, j'ai croisé le regard de Jonnie et j’ai vu qu’il comprenait ce que je voulais dire. Il se sentait entravé dans sa créativité mais on sentait qu’il en avait encore sous le coude. Un an plus tard, il avait repris l’établissement et décrochait l’étoile. Il avait compris ce qui manquait à ses plats. De Librije occupe une place particulière dans mon parcours professionnel. Je n’ai pas appris à cuisiner à Jonnie Boer évidemment mais je pense avoir contribué humblement à sa réflexion sur ce qu’est une cuisine étoilée.

Au cours de ma carrière, j'ai développé de précieuses compétences dans les relations humaines. Etre inspecteur nécessite de savoir s’adapter aux circonstances. J'ai été confronté à des chefs en colère, pas toujours pour des raisons liées aux étoiles, bien sûr. Parfois c'était simplement pour des détails insignifiants. La clé, c’est la communication. Une bonne conversation peut véritablement changer la donne.


La semaine prochaine : le soufflé de Romeyer

Head photo ©Lyan van Furth

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