"L’annonce de la mise en quarantaine, à vingt heures, en plein service, a été très violente. Il a fallu fermer le restaurant à minuit et rentrer chez nous. Nous respectons les interdictions du gouvernement. Il en va de la santé publique. Mais l’arrêt total, c’est un moment étrange dans la vie d’un cuisinier. On réapprend à avoir le temps, à vivre en famille."
“Je retire les mauvaises herbes du jardin… à la pince à épiler, pour ne pas aller trop vite.”
"On joue au tarot, au ping-pong, les enfants suivent leurs cours sur ordinateur, je regarde des films que je n’ai jamais eu le temps de voir. Je donne des cours particuliers de cuisine à ma femme Hélène, ça fait vingt ans qu’elle me le réclame… Elle se débrouille bien ; je pense que je vais la prendre comme commis ! Le reste du temps, je retire les mauvaises herbes à la pince à épiler, pour ne pas aller trop vite.
“En contact constant avec les équipes”
Je conserve un contact constant les équipes, qui jouent à Mario Kart en réseau... Je vais au restaurant une demi-heure par jour, pour m’assurer qu’il n’y a pas eu d’actes de vandalisme. J’apporte aussi de la nourriture à deux jeunes stagiaires d’Amérique du Sud, qui dorment au restaurant. Par chance, mes chefs japonais et américains ont pu être rapatriés. Je pense qu’on va perdre un million d’euros. J’espère que le festival de Cannes sera maintenu, même décalé à juillet… mais ça risque d’être le pic de l’épidémie aux Etats-Unis. Notre grande appréhension, c’est l’hiver. J’ai régulièrement Georges Blanc, Olivier Nasti, Yoann Conte ou Franck Putelat au téléphone, on se donne des nouvelles. C’est important. J’espère surtout que ceux qui viennent de s’installer vont survivre. Et même s’il est très difficile de se projeter, je réfléchis déjà aux cartes de mai..."
Bruno Oger est le chef de La Villa Archange, Le Cannet, France.