« En Zélande, les algues sont très courantes, on les trouve partout sur les plages. Elles sont très utilisées dans notre région, tout comme les légumes de mer salés tels que la salicorne et la lavande de mer. C'est surprenant qu'elles ne soient pas plus présentes dans la cuisine néerlandaise, au vu des nombreuses possibilités culinaires qu’elles offrent ».
Massivement cultivées en Asie, en particulier en Indonésie, les algues sont ensuite séchées puis expédiées dans le monde entier, y compris aux Pays-Bas. Une pratique qui laisse le chef Meijer perplexe. « Les consommateurs se tournent vers les algues industrielles alors que de nombreuses variétés comme le wakame et le nori se trouvent en abondance sur nos plages ».
« Nous nous fournissons auprès de l’entreprise Wild Wier. Ellen et Guido les créateurs cueillent les algues à la main une fois par semaine dans l'estuaire de l'Escaut oriental. Ce sont des passionnés, ils ne récoltent que lorsque les conditions le permettent. C’est important pour nous de connaitre la provenance de nos produits et de savoir comment ils sont récoltés. Notre philosophie : cuisiner avec ce que la nature nous offre ».
Mais comment s'y prendre justement, avec ces algues gluantes ? C’est facile : il suffit de les récolter, les laver, les cuisiner, et le tour est joué ! « L’ébullition leur fait perdre leur rigidité. Nous faisons bouillir l’algue noueuse (aussi appelée goémon noir) et le fucus vésiculeux (ou varech) pendant une demi-heure dans de l'eau bien salée ou dans un bouillon de poulet, dont les saveurs se marient très bien avec celles des algues. Grâce à une cuisson al dente, on obtient une texture pâteuse qui s’associe à merveille avec du poisson par exemple. On peut aussi les travailler avec du vinaigre ou les utiliser dans des garums, des condiments à base de poissons fermentés. »
« Comme pour les légumes, il existe différentes variétés d’algues, et autant de façons de les accommoder. La pollution est un problème qui concerne toute la chaîne alimentaire. Cependant, avec des taux de pollution sous les seuils réglementaires, la mer du Nord et l'Escaut oriental offrent des conditions idéales pour la prolifération des algues. »
La haute saison pour les jeunes algues et le varech s’étend généralement de mai à août mais cette période peut varier en fonction des espèces, chacune ayant ses propres cycles de croissance. Au Hof aan Zee, on aime surprendre le client en servant des algues toute l’année. « Le fucus serratus, par exemple, est disponible même en hiver. Certaines algues survivent après l’été mais ne poussent plus. Elles attendent le retour des beaux jours pour se développer à nouveau ».
« Les algues sont un ingrédient vraiment génial offrant plein de possibilités d’expérimentation. Par exemple, pour un plat à base de langoustine, nous séchons le fucus vésiculeux, le faisons frire, puis l'utilisons pour faire une huile. Cela apporte beaucoup d'umami et de puissance à la recette. Quant à la conservation, l’algue noueuse et le fucus vésiculeux peuvent être congelés plusieurs mois sans soucis ».
Les algues sont souvent décrites comme l’aliment du futur. Comme le souligne le chef, leur potentiel est énorme. Il reste beaucoup à découvrir à leur sujet, et pas seulement en cuisine. « Elles poussent partout et offrent une solution au défi de la nutrition. La pâte d'algues peut remplacer le blé industriel et les fils sont utilisés pour fabriquer des textiles. L'industrie exploite déjà le potentiel des algues pour en extraire les vitamines et les antioxydants dans des compléments alimentaires.. Mais pour que les algues soit une solution durable, il est crucial que la production reste à une petite échelle et traçable. »