Gastronomie durable 2 minutes 20 août 2020

Pour une gastronomie durable : Vivien Durand

En 2020, le Guide MICHELIN met en lumière les chefs engagés pour une gastronomie durable. Aujourd'hui, Vivien Durand, chef du Prince Noir (Lormont, près de Bordeaux).

C’est par une discussion presque banale avec son binôme, Clément Bruneau, que Vivien Durand a compris l’importance d’une transition écologique au sein de son établissement ouvert en mars 2014. Déjà très impliqué dans la défense des productions locales comme le cochon de lait du Pays basque, le pigeon, les poissons des criées de l’Aquitaine, les légumineuses, il a écouté ce que Clément avait découvert dans un restaurant en Suisse : la mairie mettait à disposition des caisses pour le transport des marchandises entre le restaurant et son producteur. Des caisses lavables et réutilisables. Vivien et Clément ont appliqué à Lormont ce mode de fonctionnement pour aller vers moins de cartons, moins de cagettes, moins de polystyrènes et donc beaucoup moins de déchets.

Café Kafa, foie gras de la ferme Saint-Orens, orge malt et lentilles. ©Los Andes Agency
Café Kafa, foie gras de la ferme Saint-Orens, orge malt et lentilles. ©Los Andes Agency

Le principe, des caisses lavables qu’ils fournissent à leurs producteurs et que ces derniers doivent utiliser pour livrer la marchandise : "L’avantage, c’est que le contenu est toujours bien rangé et que l’on fait donc beaucoup moins de manipulation. On réceptionne et on stocke alors qu’avant, on réceptionnait, on déballait, on jetait les emballages en triant selon la matière et on faisait des allers-retours aux poubelles." À cette action, Vivien et Clément ont ajouté l’utilisation de produits écologiques pour le nettoyage, le tri, la revalorisation des déchets, la valorisation d’une vaisselle locale et toujours cette défense des produits régionaux. Et Vivien d’ajouter : "C’est une chaîne vertueuse, un pacte humain entre les membres de la brigade, les producteurs et nos clients avec qui nous aimons parler de nos actions. Tous ne sont pas sensibles à nos arguments mais si nous arrivons à en convaincre ne serait-ce que dix par mois, c’est un grand pas pour le vivre ensemble dans un environnement meilleur."

Vivien Durand ©Los Andes Agency
Vivien Durand ©Los Andes Agency

Quel regard portez-vous sur la période de confinement que vous avez vécu en 2020 ?
J’ai pris le temps de réfléchir à ce qu’était le monde d’avant, et au monde d’après tel qu’on nous prédisait. J’ai un peu le sentiment que tout le monde a repris ses mauvaises habitudes de consommation. Mes producteurs, qui ont beaucoup travaillé en direct avec des particuliers pendant cette période, ont senti depuis une baisse de fréquentation et donc de chiffre d’affaires. Heureusement, nous avons été là pour prendre le relais. Notre combat doit continuer au sein du restaurant en incitant les clients à consommer local, ou au moins à consommer différemment.

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Déclinaison du chevreau de lait de chez Maina & Mizel, laitue, pilon d'herbes. ©Los Andes Agency
Déclinaison du chevreau de lait de chez Maina & Mizel, laitue, pilon d'herbes. ©Los Andes Agency

Et à trier, parce que c’est votre cheval de bataille.
Oui, trier pour moins jeter, trier pour gérer moins de déchets. J’ai investi dans un déshydrateur pendant la fermeture forcée du restaurant. J’y passe entre 30 et 50 kg de déchets organiques par jour et le substrat obtenu est tamisé puis donné à mon maraîcher. C’est un investissement mais en réalité, c’est un gain de temps et d’argent. Avant, on devait trier nos déchets pour les mettre à disposition de trois sociétés et cela représente un coût annuel assez conséquent. Dans quelques mois, mon déshydrateur sera amorti et je ne serai plus lié avec ces sociétés.

Poulpe au Xipister, fèves, lentilles frites de chez Philippe Guichard. ©Los Andes Agency
Poulpe au Xipister, fèves, lentilles frites de chez Philippe Guichard. ©Los Andes Agency

Vos équipes sont-elles sensibles à ce tri ?
Nous sommes tous le gendarme de l’autre. Personne n’est à l’abri de faire une erreur de tri et ce sont les autres qui relèvent l’erreur et réexpliquent les bons gestes. Ça crée une émulation, une sensibilisation et en même temps, ça développe la bienveillance des uns envers les autres. Les plus anciens de la brigade ont pris le pli, les plus jeunes le prennent mais on sent qu’ils n’ont pas acquis les bases. Nous sommes là pour leur apprendre principalement à cuisiner mais pas seulement. À nos côtés, ils changent leur comportement. S'ils peuvent appliquer ce qu'ils ont appris en rentrant chez eux, ou même plus tard dans un autre établissement, ce sera toujours ça de gagné pour la qualité de notre environnement.

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