Gastronomie durable 2 minutes 02 mars 2020

Pour une gastronomie durable : Christophe Aribert, chef en Isère

En 2020, le Guide MICHELIN met en avant les chefs engagés pour une gastronomie durable. Cette semaine, le chef Christophe Aribert raconte son engagement tous azimuts : en cuisine, bien sûr, avec l'utilisation de produits locaux, mais aussi dans le recyclage, le compost, et la mise en place d'un lieu de travail peu vorace en énergie.

En créant la Maison Aribert (l’inauguration a eu lieu en février 2019), Christophe Aribert s’est reconnecté avec la nature, le vivant, l’humain. Pour le natif d’Autrans, c'était un changement radical de démarche. "Je me suis vu cuisiner les meilleurs morceaux d’un turbot et jeter le reste", se souvient-il. "Ce n’est plus possible de travailler ainsi aujourd’hui." Proche de la nature, il se savait éloigné d’elle par des heures et des heures passées en cuisine. "Je me suis coupé de l’humain, je ne prenais pas suffisamment de temps pour aller à la rencontre de ceux qui me fournissaient." Dans son nouvel écrin, Christophe Aribert sort souvent de sa cuisine pour embrasser cette nature iséroise qu’il ne valorisait pas assez auparavant. Il l'énonce clairement : "Je ne trouve plus de sens à cuisiner des produits qui ne sont pas issus de ma région."

Restaurant Christophe Aribert ©Studio Papie Aime Mamie
Restaurant Christophe Aribert ©Studio Papie Aime Mamie

Le chef a donc décidé de bannir le homard, les langoustines… et même la viande rouge, trop consommatrice d’énergie, pour se recentrer sur le local, les volailles et les œufs de Béranger Oddos au pied du massif de l’Obiou, les truites biologiques de Stéphane Paol à Saint-Jean-en-Royans, les champignons de Michel Grimbert à Voreppe, les légumes du marché bio de Grenoble ou du Fontanil. Des produits qu’il accompagne de ceux issus de ses deux jardins, le premier autour du restaurant cultivé en permaculture, le second à 900 m d’altitude. Objectif, être en grande partie autonome. Aujourd’hui Christophe Aribert se sent en parfaite harmonie avec sa maison, sa nature. Sa cuisine, sans avoir pris un virage à 180°, n’est que le reflet d’un homme engagé qui a su, par une nouvelle aventure, quitter l’ancien monde pour se projeter vers un avenir vertueux, durable, écologique et gourmand.

Christophe Aribert ©Studio Papie Aime Mamie
Christophe Aribert ©Studio Papie Aime Mamie

La Maison Aribert est un lieu éco-responsable à tous les niveaux. Pouvez-vous nous raconter un peu sa conception ?
Mes confrères qui s’engagent dans une cuisine éco-responsable n’ont pas forcément un lieu qui respecte cette philosophie, et ceci pour des raisons historiques ou architecturales. De mon côté, j’ai eu la chance de récupérer une bâtisse à l’abandon, à partir de laquelle tout a été repensé sur le plan écologique. Le secteur du bâtiment n’est pas encore très éthique. On casse, on jette et on refait. J’ai donc dû insister pour qu’il y ait le moins de déchets possibles, que l’on puisse redonner une seconde vie à des matériaux qui en temps normal auraient été jetés. On a conservé la charpente, des pierres, mais on a surtout intégré des matières premières éthiques comme la laine de bois à la place de la laine de verre ou la peinture aux pigments naturels. Le tout en faisant travailler majoritairement des entreprises basées en Isère.

Truite du Vercors, champignon et persil ©Studio Papie Aime Mamie
Truite du Vercors, champignon et persil ©Studio Papie Aime Mamie

L’aménagement de votre cuisine est aussi un exemple à suivre !
L’hôtel, le bistrot et le restaurant gastronomique forment un bâtiment bioclimatique, c’est-à-dire que tout est pensé pour réduire les besoins en énergie. À titre d’exemple, les réfrigérateurs de la cuisine produisent de l’eau chaude, qui repart dans le système de chauffage du bâtiment. Autre exemple, nous n’avons pas prévu de climatisation dans les chambres mais un système de circulation d’eau froide qui rafraîchit les pierres. En cuisine, désormais, nous stockons les graisses qui sont récupérées pour être traitées. Nous avons investi dans un digesteur de déchets organiques pour créer le compost destiné à enrichir le jardin. Enfin, nous avons banni définitivement le plastique. Ce que je cherche à atteindre, c’est le zéro déchet.

Raviole citron et granité thym ©Studio Papie Aime Mamie
Raviole citron et granité thym ©Studio Papie Aime Mamie

Est-ce que le jardin était au cœur du projet dès le départ ?
C’est un tout et le jardin mandala faisait partie intégrante du projet. Je me fournis encore auprès de certains maraîchers locaux sur le marché de Meylan, je poursuis mes cueillettes dans les massifs, mais l’objectif est de réduire les déplacements. Le jardin est imbriqué dans le bâtiment avec une partie qui court sur le toit du restaurant pour ne former qu’un tout. Être éthique, c’est être cohérent, aller jusqu’au bout de sa pensée. Et pour les équipes comme pour moi, c’est une source d’inspiration incroyable que d’avoir à portée de mains tous ces fruits, ces légumes et ces herbes.

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