Cérémonie du Guide MICHELIN 4 minutes 06 mars 2023

Les nouvelles Étoiles Vertes du Guide MICHELIN France 2023

En 2023, la 114e édition du Guide MICHELIN a décerné son Étoile Verte à 8 restaurants partout en France. Chacune à leur manière, ses tables épousent la cause du vivant, qui avec son potager et son verger, qui avec son réseau de petits producteurs locaux, qui avec ses maîtres d'hôtels pédagogues qui chantent en salle les vertus de la saison et du produit frais. Qui sont ces restaurants qui dessinent pour notre planète un avenir plus durable ?

Château de Beaulieu - Christophe Dufossé (Busnes) : retour au pays natal
Doublement étoilé cette année, le chef Christophe Dufossé a beau vivre dans une demeure en briques rouges du 17e s., il se revendique « cuisinier paysan ». Le Nordiste revenu sur sa terre natale a de bonnes raisons à faire valoir. Depuis qu’il a repris l’établissement des mains de Marc Meurin, il a créé un verger et un grand potager en permaculture (qui mobilise 4 jardiniers à plein temps) et qui fournit une grande partie des besoins du restaurant. Il a mis en place un réseau d’eau vertueux pour l’arrosage du parc et des potagers grâce aux sources du Domaine et des douves. Une petite ferme pédagogique avec ânes, cochon, poules, vient égayer le séjour des clients. En cuisine, le chef ne travaille que les produits de saison, les siens et ceux de ses petits producteurs locaux triés sur le volet (bœuf Angus de Busnes, échalotes de Busnes, safran du Nord, pêche de la côte d’Opale…). En salle, l’équipe n’oublie jamais de mettre en avant les produits lors de l’annonce des plats.
Christophe Dufossé, chef du restaurant Château de Beaulieu à Busnes  dans le Pas-de-Calais © Olivier Helle / Château de Beaulieu
Christophe Dufossé, chef du restaurant Château de Beaulieu à Busnes dans le Pas-de-Calais © Olivier Helle / Château de Beaulieu

Jardin Secret (Cotignac) : un éden écologique et engagé
Derrière les oliviers et les assiettes 100% authentiques du chef Benoît Witz se cache effectivement un « jardin secret » mais aussi un remarquable écosystème (pour ceux qui n’auraient pas vu dans les toilettes le panonceau « restaurant engagé »). En voici les caractéristiques les plus notables : un potager bio nourri au compost maison sur leur terrain de 3 hectares, des animaux, ô les bienheureux, nourris avec les restes de leur table Michelin ; des ruches ; une cuisine zéro déchets qui utilise les produits dans leur intégralité ; un menu unique qui change tous les jours, voire deux fois par jours. Couronnée d’une Étoile Verte, le Jardin Secret affiche sa réussite.
Le chef du Jardin Secret à Cotignac dans le Var, Benoît Witz © Hervé Fabre / Le Jardin Secret
Le chef du Jardin Secret à Cotignac dans le Var, Benoît Witz © Hervé Fabre / Le Jardin Secret

Ruche (Gambais) : un nouveau projet de vie post-Covid 19
Situé dans la Haute Vallée de Chevreuse (Yvelines), le restaurant Ruche s’est installé au Domaine les Bruyères, un ancien relais de poste devenu taverne dont l’histoire remonte à 1850. C’est en cherchant le potager de ses rêves entre deux déconfinements liés au Covid-19 que la cheffe (déjà propriétaire à Boulogne-Billancourt de la Table de Cybèle) découvre ce paradis enchanté situé aux portes de la forêt de Rambouillet. Américaine native de San Francisco, elle a trouvé ici le terrain où mettre en pratique ses conceptions éco-responsables de la cuisine. Elle cultive désormais un potager en permaculture avec ses buttes (une technique qui permet de densifier les cultures et de contrôler l'humidité des terres lourdes), sa serre et sa forêt fruitière. Quant aux viandes, elles viennent des fermes voisines et les poissons de ligne de l’Île d'Yeu. La cheffe met un point d’honneur à utiliser le produit entier (fanes, feuilles…) et pratique les techniques de conservation naturelle comme la fermentation.

Frank et Cybèle Idelot à la campagne... © Virginie Garnier / Ruche
Frank et Cybèle Idelot à la campagne... © Virginie Garnier / Ruche

Les Chemins - Domaine de Primard (Guainville) : le tournant champêtre de Romain Meder
La clef des champs lui va comme un gant. Romain Meder a longtemps tenu les cuisines du Plaza Athénée avec son mentor Alain Ducasse, dans l’un des plus beaux palaces du monde, avenue Montaigne. Il s’épanouit maintenant à la tête des cuisines de l'hôtel installé dans l'ancienne maison de campagne de Catherine Deneuve à Guainville (Eure-et-Loir). Et, en cuisine, c’est dialogue avec mon jardinier, tous les jours, un colloque d’où naissent des plats à dominante végétale ! Il faut dire que nombre des fruits et des légumes proviennent du jardin biologique de ce domaine de 40ha, cultivé selon les principes de la permaculture. Ce vaste parc comprend aussi une roseraie et une collection d'arbres et d'arbustes rares, des vaches Highland, des moutons d'Ouessant, des chevreuils et des oiseaux aquatiques qui y vivent paisiblement.

Après les dorures du Plaza Athénée, le chef Romain Meder s'est mis au vert dans l'Eure © Philippe Vaurès-Santamar
Après les dorures du Plaza Athénée, le chef Romain Meder s'est mis au vert dans l'Eure © Philippe Vaurès-Santamar

Villa Pinewood (Payrin-Augmontel) : une cuisine de cueillette entre Causse et Montagne noire
Villa Pinewood ou comment passer de l’un des meilleurs bars à vins du monde à Toulouse à une cuisine de cueillette sauvage et de petits producteurs entre Causse et Montagne noire. La philosophie d’Anne et Thomas Cabrol est radicale : priorité absolue aux produits locaux et limitation drastique de l’empreinte environnementale du restaurant. Toutes leurs assiettes viennent de produits nés aussi près que possible du restaurant et cuisinés immédiatement après leur livraison, sans séjour au frigo. Anne et Thomas collaborent avec deux botanistes et un mycologue qui les approvisionnent en produits forestiers ; eux-mêmes cultivent un potager forestier sur butte (en permaculture) pour avoir toujours sous la main de jeunes pousses et des fleurs comestibles des bois pour leurs assiettes – sans oublier un hôtel à insectes pour favoriser la pollinisation et des poules nourries avec les déchets verts du restaurant. Durant le repas qui se déroule sur un comptoir face au chef qui éclaire sa démarche locavore au travers d'explications de haute volée, complétée d'images projetées sur un écran.

Un plat de la Villa Pinewood
Un plat de la Villa Pinewood

Le Doyenné (Saint-Vrain) : un restaurant-ferme unique en son genre
Vous connaissiez le « bean to bar » pour le chocolat, voici le « farm to table ». Au Doyenné (à 35km au Sud de Paris), deux chefs australiens puisent la totalité de leur inspiration dans le potager et la ferme qui jouxtent leur restaurant. Construit au sein des anciennes écuries du château de Saint-Vrain, cette table découle de la ferme et de ses produits, et non l’inverse ! Plus d’une centaine de variétés de plantes, de fruits et de légumes sont cultivés ici selon les méthodes culturales les plus vertueuses. Des techniques qui amendent en permanence l’écosystème… au lieu de l’épuiser. Même la viande de porc provient de l’élevage maison. Serait-ce l’avenir de l’alimentation mondiale : fusionner lieux de production et de consommation pour atteindre à l’autonomie complète ? Ambitieux programme. Toujours est-il qu’ici les assiettes exhalent la fraîcheur, et les produits n’ont jamais ou presque le goût du réfrigérateur.
Shaun Kelly et James Henry ont ouvert leur Doyenné au sein du château de Saint-Vrain © James Nelson
Shaun Kelly et James Henry ont ouvert leur Doyenné au sein du château de Saint-Vrain © James Nelson

de:ja (Strasbourg) : si jeunes, si bio
Extractions, fermentations, prédominance du végétal dans les assiettes et les menus, souci du bien-être animal, y compris des poissons traités avec la méthode ikejimé, carte des vins nature : voilà les grandes lignes de de:ja, une jeune table menée avec maestria par Jeanne Satori et David Degoursy. Au cœur du quartier des XV à Strasbourg, ils font venir les produits locaux des meilleurs artisans de bouche, tous bios ou presque à 85%. Le végétal est omniprésent dans leurs menus. Pour les viandes, volailles et poissons, les jeunes chefs s’assurent des bonnes conditions d’élevage et d’abattage. Les produits sont valorisés dans leur intégralité grâce à des techniques comme le salage et la fermentation. La politique zéro déchet amène aussi à proposer parfois le lundi midi (jour de fermeture normalement) un menu composé des surplus de la semaine précédente (annoncé sur les réseaux sociaux).
David Degoursy (la moitié de de:ja avec Jeanne Satori) au travail © Mike Weiss / deja
David Degoursy (la moitié de de:ja avec Jeanne Satori) au travail © Mike Weiss / deja

La Bòria (Veyras) : le contenant et le contenu
La Bòria – petite ferme cévenole en patois ardéchois – c’est un d’abord un bâtiment construit avec des matériaux locaux à 100% ou presque – le bois de la charpente est en châtaignier du cru et même la vasque des sanitaires est taillée dans une pierre locale. Le bâtiment produit sa propre électricité par panneaux solaires et récupère l'eau de pluie. L’assiette n’est pas en reste et valorise uniquement le produit de saison local. Issus de l’agriculture biologique ou raisonnée – les prix aussi le sont, raisonnables. Tous les ingrédients ou presque sont ardéchois (y compris les citrons), sauf le café et le chocolat. Le pain au levain est fait sur place, tout comme les charcuteries. Tous en Ardèche !

Etoile et étoile verte pour Jeanne Satori et David Degoursy du restaurant de:ja © Bartosch Salmanski / Michelin
Etoile et étoile verte pour Jeanne Satori et David Degoursy du restaurant de:ja © Bartosch Salmanski / Michelin

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